Le groupe Lagardère, actionnaire de référence d'EADS, a demandé lundi à la direction de groupe de revoir les conditions de sa fusion avec le fabricant d'armes britannique BAE Systems, ajoutant un nouvel obstacle à l'aboutissement du projet d'ici le 10 octobre.
"Lagardère estime, à ce stade, insatisfaisantes les conditions de rapprochement entre EADS et BAE", annonce dans un communiqué le groupe français qui détient 7,5% du capital de l'avionneur.
L'industriel invite "la direction exécutive d'EADS à engager sans attendre l'indispensable réexamen du projet de rapprochement (...), en prenant mieux en compte l'ensemble des intérêts de l'actionnariat français de contrôle d'EADS".
"Ce projet, en dépit du potentiel industriel et stratégique qui lui est prêté, n'a pas démontré à ce jour qu'il était créateur de valeur pour EADS", a fait valoir Lagardère, dans ce communiqué qui apparait comme une réponse à une tribune libre des patrons d'EADS et BAE, Tom Enders et Ian King.
"Nous pensons que ce rapprochement constituerait pour nos entreprises la meilleure opportunité stratégique, avec un management de renommée internationale, des technologies, des capacités d'investissement et un accès au marché mondial, au bénéfice de toutes nos parties prenantes", écrivaient les deux dirigeants dans un texte publié dimanche par le site internet du Monde.
Mais Lagardère ne peut que constater que le titre EADS a perdu près de 30% en bourse depuis l'annonce le 12 septembre des discussions pour former une société dont EADS détiendrait 60%, et BAE 40%. Daimler, le partenaire allemand de Lagardère au conseil d'administration d'EADS, s'est également plaint de la valorisation retenue, jugée trop favorable à BAE.
"Il y a un problème de parité pour toutes les parties prenantes", déclare-t-on de source proche du groupe français.
Selon la règlementation britannique des fusions et acquisitions, les deux sociétés doivent garder le silence et n'ont pas le droit d'expliquer aux analystes comment ils comptent créer de la valeur. Leurs assurances sont jusqu'à présent tombées à plat.
Le groupe Lagardère et l'Etat français sont actionnaires d'EADS à hauteur de 22,35% mais ce sont les représentants de Lagardère qui siègent au conseil d'administration. Daimler exerce 22,35% des droits de vote pour l'Allemagne.
Après des fuites dans la presse, EADS et BAE ont reconnu le 12 septembre être en discussions en vue d'une fusion qui créerait le numéro 1 mondial de l'aéronautique et la défense, loin devant l'américain Boeing.
Le projet de fusion prévoit de donner une "action spéciale" à la Grande-Bretagne, à l'Allemagne et à la France, qui leur permettrait à chacun de s'opposer à ce que quiconque acquière plus de 15% du capital.
Mais d'après la presse allemande, Berlin voudrait monter au capital de la nouvelle société pour préserver la parité avec la France, qui elle entend rester actionnaire.
Tom Enders et Ian King, ont souligné dans leur tribune libre que les intérêts de l'Allemagne seraient préservés sans que le pays ait besoin d'entrer au capital du futur numéro un mondial du secteur.
Selon la législation britannique, EADS et BAE ont jusqu'au 10 octobre pour présenter un projet détaillé de rapprochement. Les gouvernements envisageraient d'étendre ce délai jugé trop court étant donné les enjeux, mais les deux groupes ne le souhaitent pas.