Cinq candidats se sont manifestés pour reprendre in extremis la raffinerie Petroplus menacée de liquidation, dont un groupe égyptien qui n'avait pas auparavant manifesté son intérêt pour le site rouennais, a révélé mardi soir le gouvernement après l'expiration du délai fixé par la justice.
Deux de ces offres "paraissent sérieuses et financées", a annoncé le ministère du Redressement productif dans une déclaration à l'AFP. "Il s'agit de l'investisseur suisse Terrae et de l'énergéticien égyptien Arabiyya Lel Istithmaraat", a précisé le ministère, ajoutant que "le gouvernement a accompagné ces repreneurs et poursuit ses efforts au côté des industriels de manière à rendre possible la reprise de la raffinerie".
Dans un coup de théâtre au soir d'une journée d'anxiété pour les salariés de Petroplus qui ont manifesté dans un vent froid devant le site plus qu'octogénaire, le représentant du groupe égyptien en France, Michel Billard de la Motte, a assuré à l'AFP avoir déposé "un plan de reprise complet de la raffinerie de Petit-Couronne", qui prévoit "la reprise de la totalité du personnel", sauf une soixantaine de salariés qui veulent prendre leur retraite.
L'offre concerne aussi une société implantée en région parisienne, qui détient des participations dans des oléoducs et des dépôts pétroliers, a-t-il précisé. "C'est un plan complet en plusieurs points: création d'une société de droit français et d'un conseil d'administration avec des personnalités françaises, financement des investissements en 2013-2014 (...), ainsi qu'un plan de recrutement et de formation", a-t-il détaillé.
De son côté, la CGT avait indiqué auparavant qu'au moins trois offres avaient été déposées, précisant qu'elles émanaient, outre Istithmaraat, du groupe NetOil basé à Dubaï et contrôlé par l'homme d'affaires libano-américain Roger Tamraz, et du groupe libyen Murzuk basé dans la ville du même nom dans le sud de la Libye.
Interrogé sur Canal+, le porte-parole de l'intersyndicale, Yvon Scornet (CGT), a précisé que ces trois offres prévoyaient "en gros" la reprise de l'ensemble du personnel. "Hier on voulait nous mettre à mort, aujourd'hui nous sommes contents, on va pouvoir travailler sur des dossiers qui vont permettre une cession et de ne pas être ce domino qui va entraîner encore d'autres dominos derrière", s'est-il réjoui.
"Beaucoup d'argent et de pétrole"
Interrogé sur France 3 Haute Normandie, un autre représentant de la CGT, Nicolas Vincent, a rapporté que le gouvernement jugeait l'offre égyptienne "sérieuse" et était prêt à engager le Fonds stratégique d'investissement (FSI) dans la reprise de Petroplus.
Sans les offres présentées avant la date butoir ce mardi, une liquidation du site paraissait inéluctable.
Le contenu des offres doit être exposé aux 470 salariés mercredi, lors d'un comité d'entreprise à partir de 14H30, selon la CGT. L'administrateur judiciaire doit transmettre les offres mercredi au tribunal de commerce qui, le cas échéant, fixera une date d'audience dans les deux à trois semaines qui viennent, selon le syndicat.
Avant l'expiration du délai pour déposer un dossier de reprise, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault s'était dit prêt à ce que l'Etat prenne une participation minoritaire dans la raffinerie normande, à condition qu'il y ait "une offre crédible"", avait déclaré le chef du gouvernement depuis Bangkok où il achevait une visite officielle.
Lundi soir, au sortir d'une réunion avec l'intersyndicale, les services du Premier ministre avaient paru pessimistes sur les chances de trouver un repreneur crédible et évoqué un plan social.
Mais mardi matin, le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, avait annoncé sur RTL que l'Etat était disposé à participer "de façon minoritaire" à la reprise, "parce qu'il faut des capitaux très importants pour réinvestir et rendre cette raffinerie performante".
Le ministre avait fixé deux conditions pour la reprise de la raffinerie: "beaucoup d'argent et du pétrole". Il avait souhaité que le repreneur provienne d'un pays producteur de pétrole et n'avait pas écarté le groupe libyen. Cette piste a "toujours été sérieuse", avait-il affirmé.
L'hypothèse d'une nationalisation du site avait été évoquée ces derniers mois par l'intersyndicale CGT-CFDT-CFE/CGC. François Hollande, qui a rencontré début janvier des salariés de Petroplus, avait dit que l'Etat ferait son "devoir" mais ne pourrait être le repreneur.
Ouvert en 1929, le site de Petit-Couronne est menacé depuis plus d'un an: dans la foulée de l’effondrement de sa maison mère Petroplus, la raffinerie a déposé son bilan le 24 janvier 2012. Elle a été placée en liquidation judiciaire le 16 octobre, avec poursuite de l'activité pour deux mois.