Au terme d'une longue et incertaine procédure de redressement judiciaire, les 1.300 salariés de Kem One concernés devraient être fixés mercredi sur leur sort et celui du groupe chimique lors d'une audience décisive du Tribunal de commerce de Lyon. Celui-ci doit en principe désigner un des deux repreneurs potentiels - le fonds d'investissement américain OpenGate Capital et l'industriel français Alain de Krassny, propriétaire du groupe autrichien Donau Chemie - des activités amont du groupe (chlorochimie et production de PVC).Mais il peut aussi rejeter les deux offres et ne désigner aucun repreneur, comme cela avait été le cas pour Petroplus notamment, malgré huit offres de reprise.Personne ne veut croire au scénario-catastrophe d'une liquidation judiciaire, qui aurait des répercussions sur toute la filière et des milliers d'emplois directs ou induits en Rhône-Alpes et Paca: 10.000 selon le ministère du Redressement productif, jusqu'à 25.000 pour les syndicats.Le tribunal, où l'audience est prévue à 14H00, pourrait toutefois faire durer le suspense 48 heures supplémentaires, le délai maximum dont il dispose pour rendre sa décision.Après neuf mois de tractations entre les principaux protagonistes du dossier, pilotées par le gouvernement, les juges ont désormais toutes les cartes en main.Les "conditions suspensives" qui avaient été posées par les repreneurs potentiels, pour pouvoir présenter des offres définitives, ont fini par être levées au forceps la semaine dernière, sous la pression notamment des pouvoirs publics, alors que les salariés avaient entamé un mouvement de blocage des sites.Les plus gros fournisseurs de Kem One (Arkema, EDF, Total) ont accepté d'abandonner leurs créances et conclu des accords avec les candidats à la reprise pour la fourniture, à des conditions avantageuses, des matières premières nécessaires à l'activité (éthylène, vapeur, électricité).L'Etat va mettre la main à la pocheDe son côté, l'Etat s'est engagé à mettre la main à la poche. Les offres de reprise "comportent toutes deux, dans le respect des procédures européennes, une proposition d'accompagnement financier de l'Etat", a indiqué Arnaud Montebourg la semaine dernière.Cette contribution de l'Etat, dont le montant n'a pas été révélé, devrait provenir du Fonds de développement économique et social (FDES), doté de 380 millions au total, et destiné à venir en aide à des entreprises en difficulté de plus de 400 salariés, dont Kem One fait partie.Enfin, le propriétaire de Kem One, le financier américain Gary Klesch, s'est engagé à vendre pour un euro les activités amont du groupe, concernées par le redressement judiciaire, mais également les productions aval (composés, profilés et tubes en PVC), bien plus lucratives, restées en dehors de la procédure.Quel que soit le repreneur choisi, les syndicats du groupe ne s'attendent pas à ce que ce nouveau chapitre de l'histoire - déjà mouvementée - de Kem One soit "un long fleuve tranquille", comme l'écrit la CGT.D'abord parce que le groupe ne sort pas indemne en termes d'emploi: en accord avec les repreneurs, la direction de Kem One a présenté un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) qui se traduit par la suppression de 97 postes, dont 51 CDI actuellement pourvus. Les représentants du personnel s'inquiètent aussi de la viabilité industrielle des projets présentés et notamment de la faiblesse des fonds propres mis sur la table par les repreneurs potentiels: 20 millions d'euros pour Opengate, 5 millions seulement pour M. de Krassny, selon elles.Les salariés de Kem One ne veulent pas que se répète la situation qu'ils ont vécue lorsqu'Arkema a mis en vente, en novembre 2011, son pôle vinylique, finalement cédé pour un euro à l'été 2012 à Gary Klesch dont la gestion très controversée a abouti moins d'un an plus tard au redressement judiciaire.Kem One emploie 2.600 personnes dans le monde, dont 1.780 en France, pour un chiffre d'affaires de 1,1 milliard d'euros en 2012.