par Shadia Nasralla et Alex Lawler
VIENNE (Reuters) - La tension est palpable jeudi à Vienne à la veille d'une réunion ministérielle de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), avivée notamment par l'annonce d'une possible proposition saoudienne de réduire la production du cartel.
Les cours du brut sont en forte hausse après l'annonce par un site spécialisé que Ryad pourrait proposer à l'Opep de réduire sa production d'un million de barils par jour (bpj).
Le brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI) à échéance en janvier prend ainsi 60 cents (1,5%) à 40,54 dollars le baril vers 11h40 GMT tandis que le Brent de mer du Nord progresse de 95 cents (2,24%) à 43,44 dollars..
La nouvelle a également conduit l'Irak à annoncer que les ministres de l'Opep déjà présents à Vienne pour la réunion de vendredi allaient se réunir dans l'après-midi pour des consultations informelles.
Ryad pourrait demander à l'Iran et à l'Irak de limiter la croissance de leur production et chercher à obtenir la collaboration de producteurs hors-Opep comme la Russie, précise le site spécialisé Energy Intelligence, qui cite un délégué du cartel.
Les Saoudiens aimeraient qu'un tel accord soit mis en oeuvre l'an prochain mais ne s'attendent pas à une décision définitive dès vendredi à Vienne, ajoute-t-on de même source.
Une source saoudienne a qualifié ces informations de "sans fondement", en réclamant l'anonymat et sans en dire plus.
Une telle proposition destinée à équilibrer les cours marquerait un revirement dans la stratégie de l'Opep, qui visait jusqu'à présent à défendre ses parts de marché en maintenant un niveau de production élevé.
L'IRAN NE VEUT PAS DISCUTER
"Le marché veut entendre d'autres intervenants pour avoir davantage d'assurances qu'il s'agit bien d'une possibilité", a commenté Ric Spooner, analyste de CMC Markets.
"Non seulement faut-il qu'ils (les autres producteurs) l'acceptent mais il faudra ensuite qu'ils respectent l'accord", ajoute-t-il.
L'Iran, qui veut profiter de la levée attendue des sanctions internationales pour augmenter sa production, n'est pas du tout disposé à envisager de la réduire.
"Nous n'acceptons aucune discussion sur l'augmentation de la production de l'Iran après la levée des sanctions", a déclaré le ministre iranien du Pétrole, Bijan Zangeneh. "C'est notre droit et personne ne peut s'y opposer".
Cité un peu plus tôt par l'agence de presse iranienne Shana, le même ministre demandait aux autres membres de l'Opep de réduire leurs exportations, qu'ils avaient augmentées tandis que le régime de Téhéran était contraint de réduire les siennes.
Le prix du baril a baissé de plus de moitié en 18 mois, passant de 115 dollars à moins de 45 dollars. Le relèvement des taux d'intérêt américains, attendu par les marchés pour la mi-décembre, pourrait accentuer la baisse, qui s'explique principalement par la surabondance de l'offre face à une demande atone.
La stratégie de défense de ses parts de marché a atteint l'un de ses objectifs en étouffant l'explosion de la production de pétrole de schiste aux Etats-Unis. La production des pays hors-Opep devrait en outre baisser en 2016 pour la première fois en près de 10 ans en raison de coupes dans les investissements.
Le problème de l'abondance de l'offre subsiste cependant, ce qui conduit les membres les plus fragiles du cartel, qui craignent de voir le baril sombrer vers les 20 dollars le baril, à exprimer de plus en plus ouvertement leurs critiques à l'égard de la stratégie voulue par Ryad.
(Bertrand Boucey et Patrick Vignal pour le service français, édité par Véronique Tison)