"C'est du vol!" Kyriakos, un artiste chypriote, venu retirer le maximum d'argent autorisé dans un distributeur afin de minimiser le montant des taxes risquant d'être prélevées sur son compte, dans le cadre du plan de sauvetage européen, se dit "en colère".
"J'ai gagné cet argent et maintenant on me le prend pour payer des erreurs qui ne relèvent pas de moi", soupire le trentenaire, patientant devant un distributeur pendant que ses deux amis, comme lui, tentent de retirer le maximum qui leur est autorisé.
"On essaie tous de retirer un maximum d'argent -- mais cela ne marche pas très bien, on ne sait pas si les comptes sont bloqués ou les distributeurs vides", peste l'un de ses amis, Joseph, employé de banque chypriote.
"Personne ne s'attendait à cela -- et les banques n'étaient au courant de rien", assure-t-il.
Afin de réduire le montant emprunté pour éviter la faillite, les bailleurs de fonds internationaux ont demandé à Chypre d'instaurer une taxe exceptionnelle de 6,75% sur tous les dépôts bancaires en-deçà de 100.000 euros et de 9,9% au-delà de ce seuil, ainsi qu'une retenue à la source sur les intérêts de ces dépôts.
Cette décision, annoncée dans la nuit de vendredi à samedi, concerne toutes les personnes résidant sur l'île.
Si des queues se sont formées devant certains distributeurs samedi matin, les agences bancaires étaient fermées pour le week-end, et jusqu'à mardi matin, lundi étant férié sur l'île.
"J'ai essayé de faire un virement ce matin, je n'ai pas réussi, mais de toute façon il n'aurait sûrement pas été validé", indique un entrepreneur français basé à Chypre.
"Je vais retirer ce que je peux, c'est toujours ça de gagné", dit-il, avant de repartir avec 2.000 euros.
Pourtant, ces retraits dans l'urgence ne vont pas empêcher la ponction sur leur compte, comme l'explique Marios Skandalis, vide-président de l'Institut des comptables publics de Chypre. Les montants correspondant à la taxe "sont déjà bloqués et ne peuvent plus être transférés", selon lui.
Les déposants à Chypre sont d'autant plus déstabilisés que les détails des mesures acceptées par Nicosie en contrepartie du plan de sauvetage ne sont pas encore connus, dans l'attente d'une validation par le Parlement chypriote.
"C'est catastrophique", lance un entrepreneur belge, estimant à 15.000 euros le montant qu'il va voir ponctionner sur les comptes de son foyer.
"Ca ne me gêne pas, c'est une contribution à un problème qui existe", déclare-t-il, se disant en revanche très inquiet de savoir si la mesure s'applique aux sociétés.
"S'ils nous prennent 10% ça veut dire qu'on ferme la semaine prochaine", souligne-t-il.
Un père de famille allemand habitant Nicosie, lui aussi, se dit "en colère". Ces mesures "touchent les familles, tout le monde, c'est injuste".
"J'ai déjà perdu mon travail, ce que je touche de l'assurance sociale ne suffit pas à faire vivre une famille, et maintenant il va falloir payer ça en plus", enrage-t-il. "Je suis étonné que les gens ne manifestent pas comme en Grèce".
Des appels à manifester ont été lancés pour la soirée et les jours à venir.