Le rachat du géant américain du hot-dog Smithfield est devenu le dernier exemple en date des acquisitions par des groupes chinois d'entreprises emblématiques à l'étranger, une tendance qui s'accélère et concerne aussi le haut de gamme.
Les sociétés de la deuxième économie mondiale ont faim de nouveaux marchés, de nouvelles technologies, et n'hésitent pas à mettre la main au portefeuille pour se rendre maîtresses de fleurons en Occident.
Shuanghui, maison-mère d'un des plus gros producteurs de viande de porc en Chine, va racheter le premier fabricant américain des saucisses de hot-dog, Smithfield, premier actionnaire des marques Justin Bridoux et Aoste notamment, pour 7,1 milliards de dollars, dette incluse.
"C'est l'une des plus grosses acquisitions d'entreprise américaine par une entreprise chinoise", a souligné Richard Peterson, analyste de S&P Capital IQ spécialisé dans les fusions.
Finie l'époque où la Chine grâce à ses achats pensait d'abord à sécuriser ses approvisionnements en minerais et en hydrocarbures.
"Les acquisitions à l'étranger vont s'intensifier", prévoit Jarod Ji, analyste à l'institut Zero2IPO, basé à Pékin.
"De nombreuses entreprises chinoises ont l'ambition de devenir des marques mondiales", confirme Shaun Rein, directeur général du China Market Research Group, en citant l'exemple du conglomérat Fosun. "Elles sont très agressives, très ambitieuses et elles veulent se développer vite".
OPA sur le club Med
"Leur objectif est de se placer sur les marchés américain et européen, afin de se protéger du ralentissement de l'économie chinoise", ajoute-t-il.
Deux jours avant l'annonce concernant Smithfield, on apprenait l'intention de Fosun de lancer une offre publique d'achat (OPA) sur le Club Med, groupe français de tourisme haut de gamme, en alliance avec le fonds Axa Private Equity.
L'opération vise à accélérer le développement international du groupe de tourisme.
Et le mois d'avant, les montres suisses Corum annonçaient être rachetées par le groupe chinois China Haidian, pour un montant non dévoilé. Il s'est agi du premier rachat dans la haute horlogerie suisse par un groupe chinois.
"Les acquisitions faites à l'étranger par les sociétés chinoises montrent que la Chine est en train de revoir son positionnement dans l'économie mondiale", souligne Li Guoxue, chercheur à l'Académie chinoise des sciences sociales.
Cela est selon lui facilité par l'influence grandissante de la Chine sur le plan international.
Début 2013, le géant pétrolier chinois CNOOC a officiellement racheté le groupe énergétique canadien Nexen, concluant une transaction record de 15,1 milliards de dollars, soit la plus importante acquisition chinoise à l'étranger.
Parmi les autres rachats qui ont fait du bruit, il faut citer celui l'an dernier du fournisseur de machines pour le BTP Putzmeister, une entreprise emblématique du modèle allemand, par le chinois Sany. Putzmeister est une société typique du "Mittelstand" allemand, ces entreprises de taille moyenne à la pointe de la technologie dans leur secteur qui font le succès de l'Allemagne à l'exportation.
Les investissements directs à l'étranger chinois, hors secteurs financiers, ont augmenté de 28,6% en 2012, dépassant 77 milliards de dollars.
"Ce sont des sociétés de plus en plus importantes, qui sont à la recherche d'occasions (pour investir)", analyse Bala Ramasamy, professeur à la China Europe International Business School (CEIBS) de Shanghai. "Or les occasions ne sont plus nationales mais elles sont devenues internationales".