Trente étudiants de six prestigieuses universités américaines se sont affrontés cette semaine à Wall Street pour arracher le titre de "meilleur jeune trader américain", une compétition destinée à identifier les espoirs de la Bourse de demain.
"Faites de l'argent, soyez gentils avec vos clients et prenez aussi peu de risques que possible", lance Simon Meijlink, patron d'Oxyor, une société spécialisée dans la formation des courtiers installée au Pays-Bas et organisatrice du "Traders Trophy", un concours qui regroupe désormais 13 pays et auquel les Etats-Unis participaient vendredi pour la première fois.
Des haut-parleurs reproduisent le brouhaha d'une salle de marché, entrecoupé de dizaines de coups de téléphone.
Quatre jeunes femmes et 26 jeunes hommes de 21 à 31 ans aux visages tendus s'affrontent sur un logiciel de simulation d'échanges boursiers, dans une salle de la Bourse de New York, pour ces éliminatoires américains parrainés par l'opérateur NYSE Euronext et Barclays Capital.
Tout aussi excité, Kenneth Polcari observe, hilare, les jeunes cliquer et tapoter sur leur clavier avec concentration. Fort de ses 28 ans d'expérience sur le parquet de la Bourse, ce responsable d'ICAP Equities, le plus grand courtier interbancaire du monde, est venu leur faire une petite présentation du métier.
Un travail qui a bien changé avec la fin de la criée et l'automatisation des échanges: "Avant, vous pouviez sentir la salle, c'était plus facile de lire le marché", raconte Kenneth Polcari.
"Mais bon, les jeunes d'aujourd'hui, ils sont branchés sur les réseaux sociaux, sur l'informatique. Ils lisent le marché d'une façon différente", ajoute-t-il.
Une séance à Wall Street est condensée en un peu plus d'une heure. Les concurrents ont trois titres à échanger (American Express, Wal Mart, AT&T).
Les concurrents semblent pris par le feu de l'action. La cloche de clôture sonnée, les positions clôturées, l'adrénaline se sent encore dans les voix, les mains qui se tapent en guise de congratulations.
"C'est comme faire du sport. J'étais tout le temps en alerte. J'adore la compétition", exulte Elizabeth Jeong, étudiante à New York University Stern. Avec 40.000 dollars de bénéfices, la jeune étudiante d'origine coréenne, pimpante dans son tailleur un peu sévère, croit en ses chances.
Une assurance justifiée: elle emporte le premier prix, et rafle 1.000 dollars, ainsi qu'une bouteille de Cognac bouchée à la main et numérotée. Elle représentera les Etats-Unis lors de la finale internationale, à Amsterdam, en mai.
"Je regarde les graphiques", explique simplement Ryan Potter, étudiant au visage enfantin de Penn State (Pennsylvanie, nord-est), en référence au parti pris technique qu'adoptent les apprentis traders qui fonctionnent beaucoup à l'instinct.
Le blondinet, "très détendu tout au long de la séance" et qui pourrait se révéler "un excellent opérateur de marché", selon Simon Meijlink, prend la deuxième place.
Le goût du jeu, qui a tenu ces étudiants en haleine, est bien vite remplacé par l'émerveillement pur quand les apprentis traders sont invités à traverser le mythique parquet de Wall Street, pour conclure la journée.
Au milieu des écrans où les couleurs flashent et les chiffres défilent à toute allure, les jeunes gens sortent leur smartphone pour immortaliser le moment. Le parquet, très masculin, réserve une ovation à la jolie Elizabeth qui brandit son trophée.
Un petit groupe s'agglutine autour de l'un des postes d'échanges, où un trader de Barclays Capital explique qu'il est responsable à lui seul de quelque 10% du volume total des actions Chevron échangées ce vendredi. Il est accueilli par un murmure d'adoration.