Accusée d'avoir freiné le sauvetage de la Grèce, la chancelière Angela Merkel s'est défendue mercredi et a plaidé pour la participation allemande devant les députés, qui devraient la soutenir malgré l'hostilité de l'opinion publique.
Longtemps réticente à ouvrir les cordons de la bourse pour Athènes alors que son camp fait face à une échéance électorale cruciale dimanche, la chancelière a dû virer de bord devant l'ampleur de la déroute financière de la Grèce, menacée de défaut de paiement.
Elle est donc partie en campagne pour expliquer pourquoi l'Allemagne devait débourser 8,4 milliards d'euros cette année et jusqu'à 14 milliards d'euros supplémentaires d'ici fin 2012, sa contribution au plan conjoint de 110 milliards d'euros de l'Union européenne et du Fonds monétaire international (FMI).
Il y va "de l'avenir de l'Europe et de l'avenir de l'Allemagne en Europe", a-t-elle martelé devant les députés, après avoir multiplié lundi et mardi les entretiens télévisés.
"Nous protégeons notre monnaie" en aidant la Grèce, dont les difficultés mettent en péril toute la zone euro, a-t-elle ajouté.
Le président de la Bundesbank, Axel Weber, qui s'est adressé dans la matinée aux membres de la commission du budget du Bundestag, est allé dans son sens. Un défaut de paiement de la Grèce représenterait "un risque considérable" pour la zone euro, et aurait "des effets de contagion graves", a-t-il dit. En reconnaissant toutefois qu'aider Athènes n'était "pas dénué de risques".
Critiquée par ses partenaires pour ses atermoiements, Mme Merkel s'est défendue d'avoir ralenti le processus. En agissant plus tôt, "nous aurions produit l'effet contraire", selon elle.
"Votre double jeu nous a coûté beaucoup de confiance et d'estime en Europe", lui a reproché le chef du groupe parlementaire social-démocrate, Frank-Walter Steinmeier.
Les électeurs allemands ne sont pas plus cléments. Pour près de la moitié d'entre eux (48%), Mme Merkel n'a "plutôt pas bien" voire "pas bien du tout" fait face à la crise grecque, selon un sondage publié mercredi.
Le Bundestag doit se prononcer d'ici vendredi sur la loi qui permettra le déblocage des fonds. Beaucoup de parlementaires se sont irrités d'une procédure accélérée qui verra leurs délibérations réduites au strict minimum.
Sur le fond, Mme Merkel est loin d'avoir le soutien de toute l'assemblée. "Je ne voterai pas en faveur de l'aide à la Grèce", a ainsi affirmé au le député Frank Schäffler, membre du parti libéral FDP qui gouverne avec les conservateurs de Mme Merkel.
"Chacun serre les dents" à la perspective de voir l'argent allemand couler en direction d'Athènes, a déclaré le chef du FDP, le vice-chancelier Guido Westerwelle.
Selon un sondage paru dimanche, 56% des Allemands sont opposés à un soutien financier de la Grèce.
Le feu vert des députés ne fait pas doute, le gouvernement ayant une confortable majorité au Bundestag. Mais pour s'assurer le soutien le plus large possible des parlementaires, dont beaucoup refusent de signer "un chèque en blanc" à la Grèce, le gouvernement vise l'adoption en parallèle d'une déclaration sur une réforme du pacte de stabilité et la régulation des marchés financiers.
La chancelière veut "tirer les leçons" des déboires de la Grèce, en imposant un contrôle accru de la discipline budgétaire des membres de la zone euro et des sanctions plus strictes.
Elle a dit vouloir "élaborer une procédure codifiée de défaut de paiement" pour les pays européens. "Je m'engage personnellement et avec force" pour une réforme des traités, même si celle-ci sera "longue et laborieuse", a-t-elle dit. Autre piste envisagée, notamment sous la pression du FDP, la création d'une agence de notation européenne.