La Cour des comptes a averti le gouvernement que le déficit public risquait de déraper en 2013 par rapport aux prévisions, tout en excluant la nécessité d'un collectif budgétaire à mi-année, dans un rapport publié jeudi.
Si la croissance française était plus basse que le taux de +0,1% prévu par le gouvernement pour 2013, comme l'annoncent la Commission européenne, le FMI mais aussi désormais l'Insee, "le déficit public effectif pourrait se situer entre 3,8 et 4,1% du PIB", affirme la Cour des comptes dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques.
La France qui s'était engagée auprès de ses partenaires européens à ramener ses déficits à 3% de son produit intérieur brut dès 2013, a obtenu deux ans de délai pour atteindre cet objectif. Minée par une croissance nulle, elle a désormais jusqu'à 2015 pour passer sous la barre des 3%.
Pour 2013, si les dépenses devraient être contenues, grâce notamment à la "réserve" prévue en début d'année pour compenser les dérapages à l'exécution, la situation est différente du côté des recettes, observe la Cour.
"Hors révision de la croissance économique, la Cour a identifié des risques sur le produit des recettes qui peuvent représenter, dans l'hypothèse élevée, jusqu'à 6 milliards d'euros, soit 0,3 point de PIB", a précisé le premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud, auditionné par la commission des Finances de l'Assemblée.
Le rendement de la TVA et de l'impôt sur les sociétés annoncé par le gouvernement est notamment mis en cause.
Pour autant, M. Migaud a estimé que "la moitié du chemin de redressement a été parcourue" en terme de réduction du déficit structurel (hors aléas de conjoncture).
A condition que le gouvernement tienne strictement "l'effort programmé, le plus important de notre histoire budgétaire récente" en 2013, il a jugé inutile le recours à un collectif budgétaire en milieu d'année pour procéder à des ajustements.
Concernant 2014 et 2015, M. Migaud a en outre rappelé que l'effort prévu, de "1,6 point de PIB au total, s'il est moins important que celui de la seule année 2013 représente une exigence forte". Dans son rapport, la Cour estime d'ailleurs que les 13 puis 15 milliards d'économies dans les dépenses à réaliser en 2014 et 2015 devaient être "réparties entre toutes les administrations publiques".
La Cour regrette dans son rapport à ce propos que le gouvernement n'ait pas fourni le détail des économies qu'il souhaitait effectuer.
La Cour des compte confirme par ailleurs qu'il faudra 12 milliards d'euros supplémentaires de prélèvements obligatoires en 2014. Le programme de stabilité présenté en avril à la Commission européenne annonçait déjà ce chiffre et détaillait ces prélèvements (augmentation des taux normal et intermédiaire de TVA, lutte contre la fraude fiscale, nouveau coup de rabot sur les niches).
Le poids du déficit des retraites dans les comptes sociaux étant, selon elle, trop lourd, la Cour a préconisé pour résorber la dette sociale au plus tard en 2025, "des mesures de rééquilibrages à effet immédiat d'un impact au moins égal à 20 milliards sur le solde annuel du régime général (de la Sécurité sociale, NDLR) à l'horizon 2017".
Cela représente "de nouveaux efforts cumulés de 5 milliards par an pendant 4 ans", et doit concerner en particulier les branches vieillesse et maladie de la Sécurité sociale, estime la Cour des comptes, soit des efforts plus importants que ceux envisagés par le gouvernement.
Affirmant "partager les grandes lignes des analyses que fait la Cour des comptes", le ministère de l'Economie a estimé dans sa réponse écrite que si "l'environnement économique demeure très incertain en 2013", il était "encore trop tôt pour tirer des conclusions définitives sur l'évolution des recettes sur l'ensemble de l'année 2013".
Bercy a en outre "remercié" la Cour des pistes de réformes qu'elle propose à la fin de son rapport.
"Il existe incontestablement d'importantes marges de progrès pour améliorer la performance des politiques publiques et des organismes publics sans remettre en cause la qualité du service rendu ni remettre en cause les principes du modèle social français", a déclaré M. Migaud jeudi.
Il a notamment cité une "moindre revalorisation de certaines prestations sociales, à l'exception des minima sociaux" mais aussi "un ciblage plus pertinent des dispositifs d'aide à la presse, d'aide aux buralistes, de certaines aides au logement ou encore dans le secteur de la formation professionnelle continue".
Il a également suggéré de ne pas remplacer un fonctionnaire sur six partant à la retraite afin de ne pas prolonger le gel des salaires de la Fonction publique.