Le président de la banque centrale américaine (Fed), Ben Bernanke, a réaffirmé mardi avec force le cap de la politique de soutien extraordinaire à la reprise économique suivie par la Réserve fédérale.
Il a également exhorté les élus à éviter les coupes budgétaires censées entrer en vigueur au 1er mars, pour ne pas faire peser un "poids supplémentaire [...] important" sur une croissance économique dont le rythme sous-jacent "reste lent".
Malgré l'amélioration récente de la reprise, après son coup de mou du quatrième trimestre, "le marché du travail reste globalement faible", a déclaré M. Bernanke, à l'occasion d'une audition de plus de deux heures devant la Commission bancaire du Sénat.
"Les bénéfices" de l'action de la Fed "sont évidents", a-t-il ajouté, citant le "redémarrage du marché du logement", l'"augmentation des ventes d'automobiles et d'autres biens durables", ainsi qu'"une hausse de l'emploi et de la richesse des ménages" qui soutient en retour "le moral et les dépenses" des Américains.
M. Bernanke a indiqué que, en l'absence de menace d'inflation et à l'heure où la hausse des prix reste globalement "faible", la lutte pour le redressement du marché de l'emploi était la priorité.
Le maintien d'un taux de chômage élevé (actuellement de 7,9%) "a des coûts importants", non seulement sur le plan social, mais "porte aussi préjudice à la vitalité et au potentiel de notre économie", a-t-il dit.
Depuis le début de l'année, la Fed injecte 85 milliards de dollars de liquidités dans le système chaque mois en rachetant des titres sur les marchés financiers.
Ces rachats sont combinés à la promesse de maintenir le taux directeur de la Fed dans la fourchette de 0 à 0,25% qui lui est assignée depuis 2008, "au moins tant que le taux de chômage restera au-dessus de 6,5%", si cela ne remet pas en cause l'objectif d'inflation à moyen terme de la Fed (2,0% sur un an).
Toutes ces mesures ont pour but de maintenir une pression maximale sur l'ensemble des taux d'intérêt, du plus court au plus long terme, afin de favoriser l'investissement, la consommation et le marché du logement et, in fine, de hâter la reprise du marché de l'emploi.
La Fed a révélé le 20 février qu'un nombre important de ses dirigeants s'inquiétaient "des coûts et des risques potentiels" (difficulté à normaliser la politique monétaire le moment venu, possibles pressions inflationnistes à terme ou atteintes à la stabilité financière) découlant de son action.
M. Bernanke a cependant estimé devant les élus que ces coûts et risques n'annulaient pas encore les bénéfices de la politique actuelle et qu'ils restaient maîtrisés.
Pour Jim O'Sullivan, économiste du cabinet HFE, le chef de la Fed a indiqué que la banque centrale n'avait "aucune intention de réduire [son soutien à la reprise] dans l'immédiat".
Son confrère Harm Bandholz, de la banque Unicredit, estime que "la Fed va continuer son programme de rachats d'actifs [...] jusqu'à la fin de l'année", mais que le rythme de ces opérations pourrait être ralenti au deuxième semestre "pour assurer une transition souple".
M. Bernanke a conseillé d'autre part au Congrès et au gouvernement "de remplacer les brusques coupes dans les dépenses" prévues automatiquement pour le 1er mars "par une politique qui réduirait le déficit de l'Etat fédéral plus graduellement à court terme mais plus fortement à long terme", a-t-il dit.
Jugeant que les réductions budgétaires programmées pour entrer en vigueur à partir de vendredi devraient amputer la croissance du PIB américain de 0,6 point cette année, M. Bernanke a estimé que leur effet ne serait probablement pas "immédiat" mais qu'il "devrait s'étaler sur plusieurs mois".