Les ministres des Finances de la zone euro se sont dits satisfaits vendredi à Madrid des avancées de leur plan d'aide à la Grèce, mais le projet de la Commission d'instaurer un plus fort contrôle budgétaire pour éviter d'autres crises a froissé l'Allemagne.
Les grands argentiers des 16 pays partageant l'euro "ont expliqué à quel stade était arrivés leurs préparatifs techniques et législatifs" nationaux pour activer des prêts bilatéraux à la Grèce "pour le cas où le mécanisme serait déclenché", a indiqué leur chef de file, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker.
"Ces travaux préparatoires dans les Etats membres de la zone avancent à une allure satisfaisante, tout comme d'ailleurs les discussions avec le Fonds monétaire international, qui portent sur le programme d'assistance commun", a-t-il ajouté.
Les pays de la zone euro ont mis dimanche à la disposition de la Grèce un plan d'aide sans précédent, passant par des prêts d'au moins 30 milliards d'euros, associés à ceux du FMI, pour l'aider à sortir de la crise budgétaire dans laquelle elle est engluée.
La Grèce a entamé jeudi le processus qui pourrait enclencher l'activation de ce mécanisme d'aide, et des équipes de la Commission, de la BCE et du FMI se rendront à Athènes lundi pour commencer à parler des politiques à mettre en place avec les autorités grecques.
"Il s'agit de préparer un programme commun de conditionnalité et de financement", a précisé le commissaire européen aux Affaires économiques Olli Rehn.
Cependant, "il n'y a aucune demande du gouvernement grec", a-t-il réaffirmé.
M. Rehn a aussi présenté aux ministres ses suggestions pour éviter de nouvelles dérives budgétaire à l'avenir dans la zone euro, en coordonnant mieux les politiques économiques.
Ses propositions finales sont attendues pour la mi-mai, mais il a déjà suscité l'opposition de l'Allemagne en suggérant que "les projets de budgets ou les grandes orientations budgétaires puissent être examinés par les Etats membres de la zone euro avant d'être approuvés par les Parlements nationaux".
"Il est évident qu'on ne doit pas toucher à la prérogative nationale en matière de budget", a prévenu le secrétaire d'Etat allemand aux Finances, Jörg Asmussen.
"Le droit du Bundestag en matière de budget ne doit pas être limité", a-t-il ajouté.
Jean-Claude Juncker en revanche a dit "soutenir la proposition du commissaire Rehn" à "100%".
"Il ne s'agit pas de priver les Etats membres et les Parlements nationaux de droits spécifiques, il s'agit de (partager) l'information", a-t-il jugé.
Cela permettrait notamment d'"essayer d'avoir une certaine influence quand un budget va dans une direction qui ne semble pas convenir aux autres", a-t-il ajouté.
La France s'est elle montrée prudente. "Je n'ai pas de position précise à ce stade" car "je veux comprendre la proposition" de M. Rehn, a déclaré la ministre de l'Economie Christine Lagarde.
"Mais nous devons inventer le moyen de nous rendre davantage de comptes les uns aux autres", ce qui "ne veut pas nécessairement dire s'immiscer dans les processus souverains de mise en place des budgets", a-t-elle ajouté.
La Commission veut par ailleurs créer un "mécanisme permanent" d'aide pour les pays en graves difficultés budgétaires comme la Grèce, mais assorti de conditions très strictes, pour que son utilisation soit limitée, une idée approuvée vendredi par les ministres des Finances.
"Nous sommes tombés d'accord sur la nécessité de mettre en place un mécanisme permanent de crise", a déclaré M. Juncker, précisant que la Commission allait faire des propositions sur ce sujet.