La fraude aux prestations et cotisations sociales est évaluée à plus de 20 milliards d'euros par an dans un rapport parlementaire, dont l'AFP a obtenu copie et qui préconise notamment une carte Vitale biométrique, à durée limitée.
Tout en félicitant le gouvernement pour les résultats déjà obtenus (458 millions d'euros de fraudes détectées en 2010 et 1,7 milliard récupérés depuis 2006) le rapport estime que ces résultats "restent insuffisants".
"Rappelons que la fraude sociale représente près de 20 milliards d'euros, soit 44 fois plus que la fraude actuellement détectée", écrit le rapporteur des travaux de la Mission d'évaluation des comptes de la sécurité sociale (Mecss) de l'Assemblée nationale, Dominique Tian, député UMP des Bouches-du-Rhône.
Au terme de 11 mois d'enquête comprenant 28 auditions et six déplacements en régions, le parlementaire se dit "convaincu que la fraude sociale représente des montants financiers bien plus importants que ce que les premières évaluations réalisées laissent supposer".
Il évalue la fraude aux prélèvements (cotisations patronales et salariales non versées en raison du travail au noir) entre 8 et 15,8 milliards et celles aux prestations (indemnités d'arrêts maladie, allocations familiales, RSA etc..) entre 2 et 3 milliards.
Ce chiffre de 20 milliards est proche de celui du déficit de la Sécurité sociale envisagé pour 2011.
En matière de travail illégal, l'élu UMP juge que "la pratique est courante, pour ne pas dire banalisée, dans certains secteurs de l'économie".
"Entre 10% et 12% d'entreprises sont en infraction et entre 5% et 7% de salariés ne sont pas déclarés", relève le rapport.
M. Tian s'inquiète aussi du développement d'"escroqueries organisées par des réseaux de fraudeurs".
Parmi 53 suggestions, la Mecss préconise de "rétablir le face-à-face pour la constitution de dossiers initiaux de demandes de prestations sociales et pour lesquels les téléprocédures facilitent la fraude".
Elle demande une carte Vitale biométrique, à durée limitée, "qui contiendrait l'ensemble des données de sécurité sociale de l'assuré" et qui serait délivrée par les mairies, comme pour les passeports ou les cartes d'identité.
Pour mieux "cibler les publics fraudeurs", le rapport encourage la généralisation du "Data Mining", ou exploration des données, qui consiste à croiser de multiples données venant de différentes sources.
Les organismes sociaux qui peuvent désormais échanger des informations avec le fisc ou les banques vont bénéficier d'ici la fin 2011 d'un Répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS) qui permettra de repérer des prestations incompatibles dans différentes branches.
En matière d'arrêts maladie abusifs, le rapport suggère de développer les "contre-visites" dans le privé et ce qui serait nouveau, chez les fonctionnaires.
Ces visites sont effectuées par des médecins libéraux à la demande des employeurs. Ces contrôles concernent surtout les courtes absences répétées alors que les médecins contrôleurs de l'Assurance maladie se concentrent sur les arrêts de longue durée.
Pour lutter contre l'absentéisme, le rapport suggère "le principe des primes de +présentéisme+" à l'image de ce qu'ont fait les hôpitaux de Marseille, en accordant 219 euros bruts aux agents n'ayant aucune absence dans l'année.
"Cette politique, à certains égards désolante, a eu un effet immédiat puisque le taux d'abstentéisme a reculé de 0,5% en 2010", alors qu'il a augmenté dans les autres hôpitaux, selon le rapport.
De son côté le gouvernement doit mercredi en Conseil des ministres faire le point sur son action en matière de lutte contre les fraudes sociales.