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Face aux menaces sur l'emploi, une "bouffée" de violence sociale

Publié le 05/11/2013 14:40
Mis à jour le 05/11/2013 17:15

Face aux annonces quasi quotidiennes de destructions d'emploi et sur fond de ras-le-bol fiscal, une "bouffée" de violence sociale semble émerger dans le pays, selon des experts, qui notent qu'elle est pour l'heure circonscrite mais échappe aux syndicats, comme en Bretagne.

Les actions violentes se sont multipliées ces dernières semaines: des salariés de Tilly-Sabco ont défoncé lundi la grille de la sous-préfecture de Morlaix (Finistère), des bornes ou portiques écotaxe ont été détruits, notamment en Bretagne, et dans le Nord, des salariés de VG Goossens ont piégé leur usine avec des bouteilles de gaz.

Dans le même temps, la liste des entreprises en difficulté s'allonge et 736 plans sociaux ont été déposés entre janvier et septembre, soit 16% de plus qu'à la même période en 2012.

Le gouvernement espérait avoir échappé à un automne chaud après la faible mobilisation sur les retraites. Mais "on peut se demander si les choses ne seraient pas en train de changer et si on n'entrerait pas dans un petit automne chaud", relève auprès de l'AFP, Dominique Andolfatto de l'université de Dijon, pour qui "les Bretons auraient allumé la mèche".

Pour Jean-Marie Pernot, chercheur à l'Ires (Institut de recherches économiques et sociales) "il y a une certaine violence sociale qui monte, une exaspération. Tous les dix-quinze ans en France on voit de telles flambées, il faut attendre un petit peu pour voir si c'est relayé" ou si "c'est juste une bouffée".

Le risque de propagation est "la question que tout le monde se pose" et "avec un pouvoir politique qui donne parfois des signes d'évanescence, ça peut être dangereux", avertit le chercheur.

'Le tempérament chaud des Bretons'

Pour lui les protestations en Bretagne "ressemblent à des manifestations de droite, contre un pouvoir politique de gauche", mais peuvent aussi relever du "tempérament chaud" des Bretons qui, il y a vingt ans, "avaient mis le feu au parlement de Bretagne".

Pour l'instant, une "jonction" entre les différents acteurs de la contestation au niveau national semble peu probable "mais ça ne veut pas dire que le front est calme", prévient-il.

Pour Jean-François Amadieu, professeur à l'université Paris I, le mode de conflit observé ces dernières semaines - saccages, menaces, bonbonnes de gaz- est "classique", notamment dans le milieu agricole, routier ou chez les pêcheurs. Mais il y a une augmentation "depuis une dizaine d'années pour des raisons de médiatisation, via la recherche des images".

Ce chercheur relève que les mobilisations se cantonnent aujourd'hui à "une défense désespérée de l'emploi". Mais, dit-il, il faut observer la "convergence des luttes" entre les indépendants, les patrons et les travailleurs parce que "ça peut prendre une tournure différente".

Les analystes s'accordent pour juger "incroyable" et "presque inquiétante" l'absence des syndicats dans le conflit breton. "Les organisations syndicales sont soit absentes soit gênées par ces événements", résume Bernard Vivier, directeur de l'Institut supérieur du travail.

Les syndicats, notamment CGT, CFDT, Unsa, ont pris leurs distances du mouvement des "Bonnets rouges", dénonçant des "amalgames", la violence et "l'instrumentalisation" par le patronat d'"un mouvement "hétéroclite".

Ainsi l’Unsa a expliqué ne pas pouvoir s'associer à des "regroupements extrémistes de tout genre parfois violents, dont l’axe central était le refus de la fiscalité, qui permet justement d’aider les citoyens et les entreprises en difficulté".

Eric Aubin, membre de la direction de la CGT, accuse le gouvernement d'avoir reculé sur l'écotaxe par "peur de la montée de mouvements violents". Or, explique-t-il à l'AFP, cela a été "un très mauvais signe" qui tend à montrer "que les manifestations avec violence donnent des résultats".

"On entend dans nos rangs des militants qui disent: +finalement, ils nous ont montré l'exemple, il faut mettre de la violence dans les manifestations+", déplore M. Aubin qui relève un "risque de débordement"

"Les syndicats n'appellent jamais à des manifestations avec violence, mais le gouvernement doit nous entendre", dit-il. "Il ne nous entend pas quand on est 300.000 dans la rue" sur les retraites "mais écoute les 10.000 qui cassent. Ca pose un vrai problème", prévient-il.

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