PARIS (Reuters) - Karim Benzema, qui n'a pas été sélectionné en équipe de France pour l'Euro 2016 de football, a ouvert une nouvelle polémique à l'approche du tournoi en accusant Didier Deschamps d'avoir "cédé à la pression d'une partie raciste de la France".
Le secrétaire d'Etat aux Sports a dénoncé des propos "injustifiés" et "inacceptables", que l'attaquant du Real Madrid tient dans le quotidien sportif espagnol Marca paru ce mercredi.
"L'équipe de France est sélectionnée uniquement sur des critères techniques et de compétence et il n'y a absolument pas le moindre racisme dans cette fédération. Le moment est venu de faire plutôt l'unité derrière notre équipe", a souligné Thierry Braillard sur BFM TV.
L'équipe de France de football, actuellement en stage à Neustift (Autriche), entamera l'Euro le 10 juin prochain par une rencontre contre la Roumanie.
Venu mercredi rendre visite aux joueurs, le président de la FFF, Noël Le Graët, a estimé que Karim Benzema, pour lequel il a "de l'affection", s'était "laissé un peu aller" et que "l'affaire" était close.
"La Fédération française de football accepte tous les gens de toutes origines et de toutes confessions et elle ne presse jamais pour le départ de l'un ou de l'autre", a-t-il à des journalistes.
Karim Benzema, a-t-il poursuivi, "n'est pas suspendu à vie". "On va faire sans lui pendant l'Euro, après on verra."
La FFF et le sélectionneur Didier Deschamps avaient décidé le 13 avril dernier de ne pas retenir Karim Benzema -- qui compte 81 sélections à son actif -- dans la liste des 23 en raison de son implication présumée dans l'affaire dite de la "sextape" visant son coéquipier Mathieu Valbuena.
Dans Marca, Karim Benzema, 28 ans, déclare ne pas comprendre son éviction "sur le plan sportif" et ajoute, "sur le plan judiciaire" : "Je ne suis pas encore jugé et je suis présumé innocent. Il faudra attendre que la justice se prononce".
"INSUPPORTABLE"
Les déclarations du footballeur font suite à des accusations de la même teneur de l'ancien international français Eric Cantona qui, le 26 mai dernier dans le quotidien britannique The Guardian, s'interrogeait sur l'absence de Karim Benzema et Hatem Ben Arfa, "les deux meilleurs joueurs en France".
L'ancien joueur de Manchester United imputait à mots couverts leur non-sélection à "leurs origines (...) nord-africaines".
Dans une interview à France Football publiée lundi, le comédien franco-marocain Jamel Debbouze estime que "Karim Benzema, et par extension Hatem Ben Arfa, payent la situation sociale de la France d'aujourd'hui".
L'ancien Premier ministre François Fillon, candidat à la primaire de la droite, a qualifié sur RTL cette nouvelle polémique d'"insupportable", "parce que le fait de ramener en permanence les problèmes du pays à des questions de race, de religion, d'ethnie et de communauté n'est pas un signe de bonne santé".
"Cette réaction est déplacée. Dans cette affaire, les questions de justice ont sans doute plus pesé que les questions de racisme. On a beau être un très bon joueur, il y a des conditions pour porter le maillot bleu-blanc-rouge", a commenté l'ancien Premier ministre (Les Républicains) Jean-Pierre Raffarin sur Europe 1.
Pour David Cormand, secrétaire national d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV), interrogé sur iTELE, "il faut entendre cette crainte, ce ressenti" face à "une forme d'islamophobie qui augmente" en France.
"Je ne crois pas que (Didier) Deschamps soit raciste, je ne pense pas que la Fédération le soit, par contre, je pense que Benzema a raison de dire que nous sommes dans un pays où le racisme augmente", a renchéri l'ancien ministre socialiste Benoît Hamon sur Europe 1.
(Sophie Louet)