Le gouvernement américain a haussé nettement le ton contre la politique de taux de change de la Chine, jeudi, mais a redit qu'il préférait le dialogue aux sanctions pour amener Pékin à évoluer.
La Chine continue "d'intervenir sur le marché des changes, très massivement, afin de limiter les pressions à la hausse des forces du marché sur sa monnaie", a déclaré le secrétaire au Trésor Timothy Geithner devant la Commission bancaire du Sénat américain.
Pékin continue "de maintenir un taux de change rigide", a-t-il ajouté, employant d'une manière générale vis-à-vis des autorités chinoises des mots bien plus forts que lors de son audition précédente au Capitole sur le même sujet, en juin.
L'approche des élections législatives (le 2 novembre) n'est peut-être pas étrangère à ce discours plus musclé, sur un sujet qui préoccupe l'opinion.
Le ministre a cependant refusé de reconnaître que la Chine manipule sa monnaie comme le pressaient de le faire les membres de la commission, républicains ou démocrates.
Le Trésor avait publié début juillet, avec près de trois mois de retard, son rapport semestriel sur les taux de changes de ses principaux partenaires commerciaux, dans lequel il jugeait la monnaie chinoise "sous-évaluée", tout en se gardant bien de l'accuser de manipuler les changes. Une telle accusation entraînerait, en vertu de la loi, l'imposition de sanctions économiques.
Le Trésor pariait sur la diplomatie, et a pu se targuer d'une première victoire lorsque la Chine a annoncé mi-juin son intention de désarrimer le yuan du dollar et de le laisser flotter plus librement.
M. Geithner a néanmoins regretté que depuis juin les Chinois avaient autorisé leur monnaie à s'apprécier "d'un pour cent seulement par rapport au dollar".
Se félicitant que le Fonds monétaire international (FMI) répète lui aussi que la monnaie chinoise est "fortement sous-évaluée", il a indiqué à la Commission que la probabilité de voir cette institution prendre des sanctions contre la Chine était pour ainsi dire nulle.
Le FMI peut prendre des sanctions contre des pays dont le taux de change est "fondamentalement mal aligné". Mais il ne l'a fait qu'en de rares occasions, il y a plus de vingt ans.
Plusieurs sénateurs ont dit au ministre, à l'instar du républicain Jim Bunning, leur "frustration" de voir les gouvernements se succéder et refuser de prendre des sanctions.
La dernière fois que Washington a déterminé qu'un pays manipulait sa monnaie remonte à 1994. C'était alors la Chine qui était visée.
S'il a refusé de dire qu'elle manipule sa devise aujourd'hui, M. Geithner a néanmoins jugé qu'elle avait mis en oeuvre "un ensemble de mesures politiques conçues pour maintenir sa monnaie sous-évaluée".
Ces propos devraient mécontenter Pékin, qui avait rejeté par avance jeudi toute nouvelle pression américaine sur sa politique de taux de change.
La sous-évaluation du yuan donne un avantage compétitif aux produits chinois vendus aux Etats-Unis. Le président de la banque centrale, Ben Bernanke, a estimé fin juillet que ceux-ci étaient globalement sous-évalués de 10 à 30% sur le marché américain.
La Chine est le pays avec lequel les Etats-Unis entretiennent le plus grand déficit commercial. Les importations de produits chinois sont responsables de près de la moitié du déficit de la balance de leurs échanges de biens.