Les ministres européens de l'Agriculture vont discuter pour la première fois lundi à Bruxelles de la proposition de la Commission européenne de laisser aux Etats de l'UE la décision de permettre ou non la culture de plantes OGM sur leur territoire.
Quinze OGM sont en attente d'autorisation, dont le maïs transgénique MON 810 du groupe américain Monsanto, l'un des deux OGM autorisés à la culture dans l'UE, a rappelé vendredi le Commission.
Monsanto demande le renouvellement de cette autorisation pour 10 ans. "Une proposition sera faite dans les mois qui viennent", a indiqué Frédéric Vincent, porte-parole du commissaire à la Santé John Dalli, en charge du dossier OGM.
Mais le commissaire, conscient des réticences de l'opinion publique, a opté pour une "gestion politique" et ne veut pas accélérer le processus d'examen des demandes, a-t-il toutefois précisé.
Contrariée par les désaccords entre les Etats, qui se défaussent sur elle, la Commission propose de leur rendre la liberté d'interdire les cultures OGM sur leur territoire. En contrepartie, elle souhaite qu'ils facilitent les autorisations de culture et de commercialisation.
Les sept pays --France, Allemagne, Hongrie, Luxembourg, Grèce et Autriche-- qui interdisent actuellement la culture du MON 810 pourront ainsi continuer à le faire sans avoir de se justifier.
John Dalli va défendre cette réforme lundi devant les ministres de l'Agriculture, mais la décision finale reviendra aux ministres de l'Environnement.
La France rejette ce "troc" et mène la révolte. Elle réaffirmera lundi son opposition et va compter ses soutiens. Le Royaume-Uni et l'Espagne sont également contre cette "renationalisation" des autorisations, jugée néfaste pour le marché intérieur.
Les régions européennes se lancent également dans la bataille pour rester "libres d'OGM".
Le conseil général du Gers, dans le sud-ouest de la France, a annoncé son intention de déposer un recours devant la Cour Européenne de Justice contre la Commission pour avoir autorisé fin juillet l'importation de 5 variétés de maïs OGM.
John Dalli est attaqué de toutes parts. La Hongrie, l'Autriche et le Luxembourg ont attaqué sa décision d'autoriser en mars la pomme de terre transgénique Amflora développée par le groupe allemand BASF et cultivée dans trois pays --Allemagne, Suède et République Tchèque-- pour l'industrie de la pâte à papier.
La "bourde" de BASF, qui a contaminé au moins trois lots d'Amflora plantés en Suède avec des semences d'une autre pomme de terre transgénique, Amadea, non autorisée, a contraint Bruxelles à taper sur la table.
"La Commission est en faveur de la destruction des lots plantés sur 15 hectares", a annoncé Frederic Vincent. "Cette décision appartient aux autorités suédoises", a-t-il toutefois précisé.
La Commission va par ailleurs publier lundi une étude sur la coexistence entre les cultures OGM et les cultures traditionnelles, a-t-il ajouté.
Ces garanties ne parviennent pas à apaiser les adversaires des OGM. L'organisation écologiste Greenpeace utilise tous les instruments communautaires pour bloquer la Commission. Dans le cadre des "initiatives citoyennes" prévues par le traité le Lisbonne, elle a lancé une pétition sur son site internet pour faire cesser les autorisations. Il lui faut 1 million de signatures et il lui en manque 124.620.
D'autres opposants choisissent la force. Des faucheurs ont ainsi saccagé en août 70 pieds de vigne transgénique plantés par l'Institut national de recherche agronomique (Inra) à Colmar (est de la France).