Le gouvernement portugais, en difficulté pour respecter ses engagements budgétaires, a multiplié vendredi les gages de bonne volonté pour rassurer ses créanciers et justifier la décision de l'Eurogroupe d'étendre les prêts qui lui ont été accordés.
L'invalidation récente par la Cour constitutionnelle de plusieurs mesures d'austérité inscrites au budget de l'Etat, a privé le gouvernement de centre droit d'économies estimées à 1,3 milliard d'euros, ce qui compromet la réalisation de son objectif de ramener le déficit budgétaire à 5,5% du PIB à la fin de l'année.
"Nous travaillons pour trouver de nouvelles mesures qui auront une valeur équivalente", a dit le Premier ministre Pedro Passos Coelho lors d'une conférence de presse avec son homologue finlandais, Jyrki Katainen, en visite au Portugal. "Nous allons anticiper des mesures prévues pour 2014", a-t-il ajouté.
Soumis à une forte pression, le gouvernement doit démontrer qu'il saura trouver la parade au verdict de la Cour constitutionnelle, alors que le risque d'un second plan de sauvetage après celui de 78 milliards d'euros, accordé en mai 2011, n'est pas encore totalement écarté.
Sans entrer dans le détail des mesures qu'il comptait prendre pour compenser ce manque à gagner, M. Passos Coelho a expliqué que le gouvernement entendait procéder dès cette année à des coupes de 600 millions dans les budgets de tous les ministères et, dans le même temps réaliser des économies, dont il n'a pas précisé le montant, affectant en priorité la Santé, la Sécurité sociale, l'Education et les entreprises publiques.
Le Premier ministre a repris ainsi son projet de réforme de l'Etat dont l'objectif est de réduire de façon permanente les dépenses publiques de 4 milliards d'euros d'ici à 2015, une intention qui lui a valu de très fortes critiques de l'opposition de gauche, accompagnées d'une forte poussée de mécontentement populaire.
Avant d'être révélée aux Portugais, les nouvelles mesures seront présentées à la "troïka" (UE-FMI-BCE) représentant les créanciers du Portugal qui doit procéder dès la semaine prochaine à une examen supplémentaire des comptes du pays avant une évaluation régulière, prévue en mai. "Nous avons mis au point certaines mesures que nous devons confirmer avec la troïka", a dit M. Passos Coelho.
A la veille de la réunion de l'Eurogroupe à Dublin, qui s'est soldée pour le Portugal comme pour l'Irlande par un allongement de sept ans des prêts accordés à ces deux pays sous assistance financière, Lisbonne avait souligné que le ministre portugais des Finances, Vitor Gaspar, donnerait à ses collègues européens des "garanties" que les engagements pris par le Portugal seraient respectés.
Avant même qu'elle ne soit effective, le Portugal a interprété une probable décision favorable de l'Eurogroupe comme une preuve de confiance susceptible de faciliter à terme son retour sur les marchés financiers prévu dès cette année, Lisbonne envisageant même de réaliser prochainement sa première émission d'obligations à 10 ans depuis sa demande d'aide internationale.
Même si la décision de l'Eurogroupe apparaît comme un sérieux encouragement, le gouvernement portugais n'est pas tiré d'affaires pour autant.
La politique d'austérité, dont M. Passos Coelho est un fervent partisan, a eu pour conséquences une aggravation beaucoup plus forte que prévue de la récession et du chômage. Alors que l'économie doit reculer cette année de 2,3% du PIB, plus de 18% de la population devrait être sans-emploi fin 2013.
En outre, il n'est pas sûr que le Portugal puisse éviter un second plan de sauvetage, selon un rapport de la "troïka" préparé en vue de la réunion de Dublin et révélé récemment par le Financial Times.
En effet, selon ce document, les besoins de financement du Portugal en 2014 et 2015, soit après la fin de son plan de sauvetage qui se termine en Juillet 2014, seront sensiblement supérieurs à ses besoins avant la crise.
Avant la crise le Portugal levait sur les marchés financiers environ 10 à 12 milliards d'euros par an alors que le document présenté par la "troïka" estime qu'en 2014, le Portugal aura besoin de 14,1 milliards d'euros et d'un montant supérieur à 15 milliards en 2015.