L'équipementier automobile américain Molex refuse de revenir sur sa décision de ne plus financer le plan social des salariés de son usine française de Haute-Garonne si une plainte déposée aux prud'hommes n'est pas retirée, indique lundi sa vice-présidente Anna Rodriguez.
"Nous sommes ouverts à un dialogue si les pouvoirs publics le demandent et si nous pouvons rencontrer des interlocuteurs raisonnables", explique-t-elle dans une interview aux Echos. "Mais il faudrait au préalable que les 188 plaintes soient retirées", ajoute-t-elle, évoquant l'action des salariés contestant leur licenciement économique pour obtenir des indemnités supplémentaires.
"Il est hors de question de renégocier quoi que ce soit", a rétorqué l'ancien secrétaire du comité d'entreprise de Villemur-sur-Tarn, Denis Parise (CGT).
"Les plaintes de salariés n'ont rien à voir avec le PSE (Plan de sauvegarde de l'emploi, NDLR) que les dirigeants de Molex s'étaient engagés à payer en septembre 2009", affirme-t-il.
"Ils voudraient qu'on s'asseoit sur le droit français, c'est bien la preuve de leur malhonnêteté", a-t-il ajouté.
Molex a annoncé récemment, qu'en réponse aux plaintes déposées aux prud'hommes, il allait cesser de financer le plan social de son usine française, fermée en 2009 après 11 mois de lutte, et s'en remettre à la collectivité pour le faire.
Dix-neuf représentants du personnel, licenciés six mois plus tard que le reste des 283 salariés de l'usine, et encore en congé de reclassement jusqu'en janvier 2011, sont les principales victimes de cette décision.
Le ministre de l'Industrie, Christian Estrosi, qui va réunir jeudi le "comité de suivi Molex", a assuré dans un communiqué que "l'Etat jouera plus que jamais son rôle afin d’assurer évidemment le paiement (...) des indemnités mensuelles de reclassement dues en septembre aux 19 salariés concernés".
"Il n’est pas question de céder en quoi que ce soit à un chantage inacceptable !", ajoute-t-il.
"Nous avons déjà payé 30 millions d'euros pour financer le plan social et 19,4 millions pour aider à la ré-industrialisation de la région", fait valoir la vice-présidente de l'équipementier automobile.
Elle explique la décision de Molex de ne pas attendre la décision du tribunal sur la plainte des salariés par la crainte "de ne pas avoir un procès équitable". "En France, à chaque fois que nous sommes allés en justice, nous avons perdu", fait-elle valoir.
Deux dirigeants de Molex ont déjà été condamnés à six mois de prison avec sursis pour avoir manqué aux règles d'information du personnel.
Mme Rodriguez réfute l'appelation de "patrons voyous" utilisée par le ministre de l'Industrie, Christian Estrosi.
"Mais qui sont les voleurs, les voyous ?", s'interroge-t-elle en soulignant que des salariés avaient endommagé du matériel lors de la fermeture de l'usine et que des dirigeants avaient été séquestrés.
Denis Parise conteste les chiffres avancés par Anna Rodriguez.
Il rejette aussi l'accusation de dégradation. "Nous n'avons plus pu rentrer sur le site de juillet 2009 jusqu'à la fermeture en octobre : je me demande comment on aurait pu casser du matériel", assure le délégué, rappelant que la direction avait même payé au personnel fin 2009 une prime conditionnée par la direction à la "bonne fin" du déménagement des outillages.
Dans un contexte de désindustrialisation, Molex est devenu un symbole de ces entreprises jugées rentables et viables, mais sacrifiées sur décision étrangère au nom d'une logique financière globale échappant au personnel.