L'or a franchi vendredi pour la première fois le seuil des 1.300 dollars l'once, tandis que l'argent s'envolait à des niveaux sans précédent depuis trente ans, tous deux profitant d'une forte demande des investisseurs spéculatifs stimulée par un affaiblissement du dollar.
Le métal jaune, qui depuis quelques jours bat record sur record, a longuement tutoyé la barre symbolique des 1.300 dollars avant finalement de la franchir vers 13H20 GMT.
Son nouveau record mettait le lingot d'or (400 onces) commercialisé à Londres au prix de 520.000 dollars environ.
De son côté, l'once d'argent a renoué avec des niveaux jamais vus depuis septembre 1980 en grimpant au-delà de 21,40 dollars.
Les deux métaux précieux ont profité d'un nouvel accès de faiblesse de la monnaie américaine, propre à rendre plus attractifs les achats d'or et d'argent, libellés en dollars, pour les investisseurs munis d'autres devises.
"La tendance de fond, qui encourage la hausse des prix, reste soutenue par le haut niveau d'incertitude concernant les économies américaine et européenne", a précisé Filip Petersson, analyste de la banque suédoise SEB.
Pour lui, la perspective d'un assouplissement de la politique monétaire américaine, qui consisterait en des injections de liquidités susceptibles de faire encore un peu plus baisser le dollar, incite les investisseurs à se reporter sur les métaux précieux.
"Le regain d'intérêt pour l'or est alimenté par la crainte que les banques centrales fassent fonctionner la planche à billets et par les inquiétudes générées par la crise des dettes publiques en Europe", confirmait Michael Hewson, de CMC Markets, selon qui l'or pourrait atteindre les 1.500 dollars avant la fin de l'année.
Confrontés à la volatilité des places boursières et des devises, comme aux incertitudes sur la valeur des obligations d'Etat, les investisseurs spéculatifs cherchant à diversifier leurs actifs apprécient l'argent et l'or, dont la valeur intrinsèque est unanimement reconnue.
Une recrudescence des achats d'or par les banques centrales, notamment en Asie, contribue également à stimuler le marché.
Selon le cabinet spécialisé GFMS, les banques centrales vont globalement redevenir cette année, pour la première fois depuis vingt ans, un acheteur net au plan mondial, les achats d'or dépassant de 15 tonnes les cessions.
De son côté, l'argent profite de son statut de métal précieux mais aussi de son utilisation dans l'industrie, notamment après de bons indicateurs manufacturiers en Chine dont les importations d'argent devraient continuer de soutenir la demande mondiale.
"Le parent pauvre de l'or rattrape son retard. Il constitue une alternative bien moins onéreuse que le métal jaune, et bénéficie d'une demande robuste de la part des investisseurs spéculatifs", a relevé Andrey Kryuchenkov, de la société de services financiers VTB Capital.
La dépendance plus grande de l'argent aux cycles économiques pourrait se retourner en sa défaveur, avertissaient néanmoins certains experts, pointant l'important excédent de l'offre de métal gris sur le marché.
Mais, à court terme, l'argent devrait accentuer ses gains dans le sillage d'un or au firmament.
Tant que les banques centrales américaine et japonaise "se battront pour déprécier leurs devises, les valeurs refuges comme l'or et l'argent attireront une demande soutenue", a assuré M. Hewson, avant d'ajouter: "maintenant, cela pourrait bien être au tour l'argent de passer à la vitesse supérieure".