L'Etat a fait son entrée, via le Fonds stratégique d'investissement, au capital de Paprec, réussite française du recyclage passée en 17 ans du statut de petite PME à celui de groupe industriel rentable de 3.500 personnes et 700 millions d'euros de ventes.
Grâce à une croissance annuelle de presque 30%, l'entreprise née à La Courneuve (Seine-Saint-Denis) est devenue sous la houlette de son fondateur Jean-Luc Petithuguenin le co-leader du recyclage dans l'Hexagone, disputant la place de numéro 1 à Sita, la filiale déchets du géant Suez Environnement.
Dans le cadre d'une recomposition complète de l'actionnariat du groupe annoncée lundi, le FSI obtiendra 25% du capital en souscrivant à une augmentation de capital de 100 millions d'euros, qui pourrait être portée, si nécessaire, à 150 millions en 2013.
"On aurait pu trouver d'autres associés, mais j'avais l'impression que le FSI était bien adapté à un projet avec un peu de nationalisme qui est de faire un champion du recyclage", a déclaré M. Petithuguenin à l'AFP.
"Le défaut des actionnaires financiers, c'est qu'ils veulent une plus-value sur 5 ans, le FSI c'est plus de la longue durée", a-t-il souligné.
Le fonds public, détenu à 51% par la Caisse des dépôts et à 49% par l'Etat, n'a pas tari d'éloges sur sa nouvelle participation.
"Avec Paprec on a une très belle entreprise de taille intermédiaire, rentable, qui est capable de devenir demain une entreprise de grande taille", a fait valoir auprès de l'AFP Thomas Devedjian, un des directeurs du FSI.
Cet investissement est, avec celui dans l'armateur CMA-CGM, le plus important réalisé par le fonds dans une entreprise non cotée.
Pour l'Etat, il s'agit aussi de soutenir la filière écologique d'avenir qu'est le recyclage, en misant sur un "champion" qui s'en est fait l'unique spécialité, a souligné M. Devedjian.
Les poids lourds français des services à l'environnement et des déchets, comme Veolia Environnement et Suez Environnement, ont également d'importantes activités d'enfouissement et d'incinération et ont tendance à craindre que la croissance du recyclage ne "cannibalise" ces activités, selon lui.
"Ils ont un vrai dilemme stratégique pour savoir s'ils valorisent cette filière au détriment de leur activité historique ou pas. Or ce n'est absolument pas le cas de Paprec", a-t-il affirmé.
L'entrée de l'Etat au capital et au conseil d'administration s'accompagne d'un vaste chambardement de l'actionnariat. Font leur sortie les actionnaires financiers entrés au capital en 2008 --la banque d'investissement Rothschild, le luxembourgeois Quilvest et en quasi totalité Groupe Arnault, la holding du milliardaire français Bernard Arnault.
La holding de contrôle de M. Huguenin va grimper à 65% du capital, grâce aux 50 millions d'euros apportés par le groupe bancaire Crédit Mutuel Arkea. Trois autres banques (BNP Paribas, Société Générale et CM-CIC), vont prendre 8%, alors que Groupe Arnault garde lui un reliquat de 2%.
Outre d'éventuelles acquisitions, la levée de fonds doit notamment permettre à Paprec de financer des nouveaux centres de recyclage pour compléter son maillage territorial en France et de se développer dans certaines filières du recyclage comme les métaux, selon le FSI.
Paprec, également connu pour ses engagements dans la réinsertion et la lutte contre les discriminations, espère en effet franchir d'ici trois à cinq ans la barre du milliard d'euros de chiffre d'affaires et des 5.000 employés.
"Dans ce secteur, un euro de chiffre d'affaires c'est un euro d'investissement", a souligné M. Petithuguenin.
Très présente dans l'ouest de la France, l'entreprise est notamment numéro un français du recyclage de papier, de plastiques et de piles et deuxième dans les déchets d'équipements électriques et électroniques. Ses quelque 80 sites recyclent plus de 5 millions de tonnes de déchets.
Le groupe est surtout connu du grand public du fait de son sponsoring du navire de Jean-Pierre Dick, qui a pris ce week-end le départ de la course autour du monde en solitaire Vendée Globe.