Les viticulteurs du Sud de la France ont accueilli lundi avec "joie" et soulagement la décision de la Commission européenne de renoncer au vin rosé fabriqué en mélangeant du rouge avec du blanc, saluant la victoire de "l'Europe des terroirs et du savoir-faire".
Michelle Nasles, productrice et membre du Conseil d'administration du Syndicat des coteaux d'Aix-en-Provence, a exprimé la "grande satisfaction" de la profession: "La mobilisation générale de la profession a porté ses fruits. Pourtant au départ, on n'était pas persuadé qu'on allait être entendu".
"La quasi unanimité de tous les producteurs français a fait changer Mme Mariann Fischer Boel (commissaire européenne à l'Agriculture, ndlr), a commenté Mme Nasles à l'AFP. Le contexte, aussi, était favorable à l'approche des européennes. Nous étions sous le feu des projecteurs".
"Alors que l'on a une certaine tradition et un savoir-faire pour produire du rosé, on allait en faire une pâle copie. Cette nouvelle (du renoncement de la Commission, ndlr) nous a fait grand plaisir. On ne s'est pas battu pour rien", a-t-elle dit.
Pour Jean-Jacques Bréban, président du Comité interprofessionnel des vins de Provence (CIVP) qui réunit négociants et producteurs, "c'est réconfortant de voir que le bon sens l'emporte". "On a bien travaillé tous ensemble, ça a été plus rapide que prévu puisqu'on attendait une décision fin juin", a-t-il souligné.
Sylvain Audemard, président des Jeunes agriculteurs du Var, a salué la victoire de "l'Europe des terroirs, des hommes et du savoir-faire contre l'Europe de l'argent". "On est très contents dans la région, on a gagné, on va continuer le combat dans ce sens-là. On sait faire du vin depuis 2.500 ans et ce ne sont pas les pays du Nouveau monde qui vont nous apprendre les pratiques oenologiques, c'est notre pratique qui doit primer", a-t-il déclaré.
Dans la méthode traditionnelle de la macération, la couleur "rosée" du vin résulte de la durée de contact entre le jus de raisin et la peau des grains de raisin. Selon l'Association générale de la production viticole (AGPV), 90% des vins rosés dans le monde sont produits selon cette méthode.
"On est contre des dérives vers le vin standardisé et industriel. Les pays du Nouveau monde veulent faire du commerce et de l'argent. Nous, on a de petites exploitations familiales mais un terroir et un savoir-faire. C'est le modèle agricole français qui est en jeu", a ajouté M. Audemard.
Pour Paul Bernard, président des vignerons indépendants du Var, la décision de la Commission est "une surprise", "on ne s'y attendait pas", a-t-il indiqué à l'issue d'une réunion de travail sur le coupage du rosé à Brignoles, lundi matin, en présence de vignerons indépendants, vignerons coopérateurs, chambres d'agriculture du Var et régionale, FDSEA et CIVP.
"Il y a de la joie, c'est sûr, mais à titre personnel une certaine prudence, Tout le monde nous donnait perdant. On continue à rester attentif car le coup est passé près. On ne veut plus avoir de surprise comme on en a eu en janvier. Il y a d'autres combats à mener. La viticulture continue à rester unie".