Effectifs pléthoriques, milliards dépensés pour une efficacité douteuse: l'Etat compte des centaines d'agences satellites aux contours et objectifs flous, qui pourraient représenter une manne en ces temps de disette budgétaire, selon un rapport publié lundi par Bercy.
Dans ce rapport commandé par le gouvernement Fillon à l'été 2011, l'Inspection générale des Finances (IGF) fustige un phénomène qui "s'est développé sans stratégie d'ensemble" et se révèle "inflationniste en termes de moyens humains et financiers".
Evoquant un "enjeu déterminant de gestion et de finances publiques", le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, et son homologue délégué au Budget, Jérôme Cahuzac, ont annoncé "de premières mesures" à l'automne, sans donner davantage de précisions.
Alors que le gouvernement cherche à économiser 10 milliards d'euros l'an prochain sur le train de vie de l'Etat, l'IGF propose de ponctionner sans attendre 2 milliards sur "les montants agrégés de fonds de roulement manifestement excessifs" de ces agences.
A plus long terme, elle suggère de revoir les rémunérations des agents de ces établissements, payés en moyenne 5% de plus que les agents de l'Etat, mais aussi celles de leurs dirigeants (122.866 euros bruts annuels en moyenne dans 250 de ces agences).
Elle envisage aussi un contrôle accru de l'efficacité d'une affectation nominative à telle ou telle agence des ressources issues de certaines taxes.
Nébuleuse échappant souvent à une tutelle effective de l'Etat, ces agences revêtent des formes juridiques et des missions multiples qui n'ont pas fait l'objet d'un "recensement exhaustif", regrette en outre l'IGF. Elle a donc procédé à son propre calcul et parle de 1.244 entités distinctes.
"Rationaliser le paysage de ces agences"
Parmi elles, 560 "opérateurs", dont la mission de service public, le financement et le contrôle sont définis par l'Etat -comme les agences régionales de la Santé, Météo France, Pôle Emploi ou le musée d'Orsay-, "représentent 20% du budget total de l'Etat et de ses effectifs".
Leurs moyens financiers, c'est-à-dire les crédits budgétaires et les ressources fiscales qui leur sont affectées (10 milliards environ), sont équivalents à 50 milliards d'euros, en augmentation de "15% entre 2007 et 2012". Cela représente "une croissance quatre fois plus rapide que celle des moyens de l'Etat", insiste l'IGF.
Quant aux effectifs, l'augmentation est à l'avenant: +6% dans ces agences sur la même période, contre -6% dans l'ensemble de la fonction publique.
Au-delà du constat chiffré, l'IGF regrette plus généralement que "l'opportunité et les modalités de recours à ces agences n'ont pas relevé d'une stratégie d'ensemble cohérente". Elle pointe par exemple des superpositions de missions, des établissements créés de manière temporaire et qui "perdurent dans le temps", ou encore des entités tellement petites qu'elles en deviennent inefficaces.
L'IGF recommande donc à l'Etat de faire le tri, afin de "rationaliser le paysage de ses agences" en le rendant juridiquement plus transparent.
D'autant plus, rappelle-t-elle, que 1.500 agents de l'Etat sont payés pour s'occuper de la seule gestion de la tutelle sur ces établissements, non compris ceux relevant de la Culture et de l'Enseignement supérieur.
"Une mission de réflexion sera lancée dans les prochaines semaines", dans le cadre de la réforme de l'action publique que le président François Hollande souhaite voir aboutir avant la fin de l'année, ont affirmé MM. Moscovici et Cahuzac, lundi dans un communiqué.