Virgin Mobile et Numericable ont renoncé jeudi à être candidats à la quatrième licence de téléphonie mobile, découragés comme d'autres avant eux par la difficulté de construire un réseau, et laissent donc le fournisseur d'accès internet Free a priori seul en lice.
Ce retrait, qui suit ceux des groupes Kertel, Orascom et Bolloré, survient une semaine exactement avant la fin de l'appel à candidatures, qui doit permettre l'émergence d'un quatrième opérateur mobile en France.
Virgin Mobile et Numericable, qui ont consacré "plus de cinq mois d'études approfondies" au projet, ont été découragés par le manque de "garanties suffisantes quant aux modalités de déploiement d'un réseau en propre pour le nouvel entrant".
En clair: comment installer des antennes alors qu'il reste peu de place à côté des réseaux existants et que les riverains, inquiets pour leur santé, les attaquent parfois en justice. Ces raisons auraient aussi rebuté Orascom et Bolloré, de source proche du dossier.
"C'est un raisonnement économique", a expliqué lors d'une conférence téléphonique Pierre Danon, PDG de Numericable: pour la licence, "il faut déployer 12.000 antennes" dont le prix unitaire varie de 5.000 à 70.000 euros suivant si c'est facile ou non de l'implanter.
"Toute l'économie du projet peut être remise en cause" selon ces variations de prix, a-t-il expliqué, d'autant que chaque implantation nécessite "une négociation avec les copropriétés", le processus prenant en moyenne 18 à 36 mois, et que "140 communes ont gelé l'implantation des antennes".
Le nouvel entrant devra couvrir 25% de la population en deux ans.
Tout cela crée "une incertitude juridique, technique, financière", a insisté Geoffroy Roux de Bézieux, PDG de Virgin Mobile, regrettant aussi que le nouveau venu ne puisse louer les réseaux 3G des trois autres, indispensables avec "l'explosion des smartphones".
Pourtant, assure Pierre Danon, les partenaires avaient les moyens, "sans ambiguïté", de financer cette candidature commune: "nous avions fait un tour de table de 300 à 400 millions d'euros" constitué pour moitié d'opérateurs mobiles virtuels, dont Virgin Mobile et Numericable, et pour l'autre moitié de partenaires financiers.
"Le reste était financé par des équipementiers télécoms", dit-il, démentant avoir été fragilisé par le retrait du soutien financier d'Orascom. Le prix de la licence est de 240 millions, mais il faut y ajouter environ 1 milliard pour construire le réseau.
Au final, Free, qui a annoncé qu'il déposerait un dossier, devrait être seul en lice: "à partir du moment où nous ne soumettons pas, il y aura très probablement un seul candidat", a reconnu M. Roux de Bézieux.
Selon lui, "Xavier Niel (le patron de Free, ndlr) est un grand professionnel, il va remplir le cahier des charges", mais son "problème va être de déployer en temps et en heure" le réseau.
Sur cette question, pas de cadeau, ont prévenu les deux groupes: "on sera très vigilants (...) que les conditions qui sont celles de la licence soient bien respectées par tous les candidats, à la fois au moment de leur soumission et dans le temps", a déclaré M. Danon, et sinon, "nous aurions une possibilité de recours".
Même si les trois opérateurs bataillent contre le prix de la licence, qu'ils jugent trop bas, et même si l'Elysée a exprimé quelques réticences, le processus semble inéluctable: l'Autorité de régulation des télécoms (Arcep), indépendante, fera connaître son choix le 29 mai 2010 au plus tard.