Déboussolés par les révoltes en Tunisie et en Egypte, échaudés par les ratés du trafic aérien et contraints de se serrer la ceinture, les Britanniques s'apprêtent à redécouvrir en masse cet été les charmes d'une vieille connaissance: la France.
Selon une étude que vient de publier l'agent de voyage britannique Co-operative Travel, portant sur près de 5 millions de dossiers, les réservations pour la France ont fait un bond impressionnant de 31% par rapport à l'an passé, loin devant l'Italie (+15%) et l'Espagne (+11%).
A l'inverse, l'Egypte est en chute libre (-30%), tout comme la Tunisie (-16%). Le "printemps arabe" a découragé les sujets de sa Majesté, qui fuient par millions à l'étranger chaque été pour se remettre d'un interminable hiver. "Les valeurs sûres sont de retour", estime le patron de Co-operative Travel, Mike Greenacre.
"La France est à la mode", se félicite Jacqueline Mirtelli, une des responsables à Londres d'Atout France, qui dépend du ministère français du tourisme. Un regain d'intérêt qui intervient "après deux années de fléchissement", au profit des plages bon marché du sud de la Méditerranée ou de la Mer Rouge.
"Avec les événements dans le monde arabe, la relation de proximité joue fortement en notre faveur", explique Mme Mirtelli, tout en rappelant que les Britanniques constituent déjà la principale clientèle touristique de la France, qu'ils sont chaque année entre 9 et 11 millions à visiter.
Destination "rassurante", la France dispose d'un autre avantage: on peut y passer des vacances pas trop chères, grâce à ses campings et ses chambres d'hôtes, un argument de poids au moment où le Royaume-Uni est soumis à un plan de rigueur sans précédent.
Atout France a d'ailleurs lancé un site centré sur ce thème, affordable-France.com ("la France abordable"), dont la fréquentation a doublé ces derniers mois pour approcher des 100.000 visiteurs annuels.
A la tête de "Destination France", un petit magazine basé dans le Staffordshire (centre de l'Angleterre), Carmen Konopka souligne "qu'on peut arriver en train ou en bateau, sans s'inquiéter d'un nuage de cendres qui bloquerait tout". Et ajoute une dose de sentimentalisme: "Pour beaucoup d'entre nous, la France est notre première expérience de l'étranger. Ce sont souvent de bons souvenirs et on a tendance à vouloir y retourner".
Pour cet été, son magazine conseille de découvrir le Minervois, dans le sud-ouest, ou de s'attarder un peu dans la ville de Grenoble avant de monter à l'assaut des Alpes.
L'Association des professionnels britanniques spécialisés sur le tourisme en France (ABTOF), qui regroupe plus de 150 membres, s'extasie de son côté sur "le fantastique réseau ferroviaire" qui irrigue le pays.
Après la série de perturbations qui a affecté le transport aérien, "c'est un atout formidable aux yeux des Britanniques", assure son parte-parole, Patrick Dely.
Quant à la mauvaise humeur légendaire des Français, elle ne relève selon lui que du "stéréotype". A la condition expresse d'éviter Paris, "une ville où l'on va juste pour se faire insulter".
Grand amateur des châteaux de la Loire et des vins de Bourgogne, Steve, un lecteur du Daily Mail, est du même avis. Après avoir sillonné le pays, il conseille lui aussi "de tout faire pour rester à l'écart de la capitale".
Il réagissait ainsi sur internet à un article rendant compte de l'engouement estival pour des voisins plus souvent critiqués qu'admirés sous un titre très inhabituel pour un tabloïde britannique: "vive la France!"