Les sénateurs de la majorité ont protesté contre l'ampleur de la dette et les méthodes du gouvernement lors de l'adoption définitive, jeudi par le Parlement, du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2011.
Le texte a été approuvé au Sénat par 173 voix contre 160.
Fait rare, le président centriste de la commission des Finances, l'ex-ministre de l'Economie Jean Arthuis, a voté contre le texte, pour lancer "un cri d'alarme" contre l'ampleur de la dette publique (1.591,5 milliards d'euros à la fin du second trimestre 2010, soit 82,9% du PIB).
M. Arthuis a protesté contre un exercice comptable -le transfert de 130 mds de dette à la caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades)- en plaidant pour de nouvelles ressources: "Il eût été judicieux de prévoir dès 2011 un supplément de cotisation de CRDS (contribution au remboursement de la dette sociale)".
Sa position heurte de plein front le dogme de l'exécutif -ne pas augmenter les impôts- répété mercredi par François Fillon dans son discours de politique générale.
La décision de M. Arthuis intervient dans un contexte de tension post-remaniement entre les centristes et l'UMP au sein de la majorité présidentielle.
Un autre sénateur, l'UMP Alain Vasselle, a lui protesté contre les méthodes du gouvernement et son "incohérence" budgétaire, exemple à l'appui: dans le budget de la Sécu, le Parlement a taxé les retraites-chapeau à partir de 400 euros par mois.
"Or, pour une raison qui m'échappe, Mme Lagarde a changé d'avis puisqu'elle a accepté en loi de finances (de l'Etat) un amendement relevant le seuil à 1.000 euros. Je m'interroge sur la cohérence du gouvernement", a lancé M. Vasselle, rapporteur du PLFSS au Sénat.
Ces protestations font écho à celles des députés, mal à l'aise avec la décision du ministre du Budget, François Baroin, d'annuler, par un second vote, 39 amendements adoptés par leur Assemblée en loi de finances.
Sans surprise, toute la gauche a voté contre le projet de budget Sécu 2011.
Raymonde Le Texier (PS) a affirmé que ce texte s'inscrivait "parfaitement dans les fondamentaux" de la politique gouvernementale: "fracture sociale pour les pauvres, facture salée pour les classes moyennes, bouclier social pour les riches".
A l'inverse, le nouveau ministre du Travail et de la Santé, Xavier Bertrand, a défendu un projet de loi "riche, équilibré, ambitieux et protecteur".
Le gouvernement met en avant les "trois axes" du PLFSS: nouvelles recettes avec la réduction des avantages fiscaux (niches), maîtrise des dépenses et transfert de la dette vers la Cades.
Au titre de la maîtrise des dépenses, le gouvernement insiste sur une progression limitée de l'objectif national des dépenses d'assurance-maladie (Ondam), à +2,9% en 2011.
Le PLFSS prévoit un déficit de 22,4 mds d'euros pour l'ensemble des régimes obligatoires de base.
Le déficit s'organise ainsi selon les prévisions du gouvernement: -11,3 mds pour la maladie, +0,1 pour les accidents du travail, -2,7 pour la famille, et -8,5 pour la vieillesse (retraites).
Au rang des mesures grand public, le gouvernement a réussi à maintenir l'expérimentation des "maisons de naissance", pour des accouchements moins médicalisés, à compter de septembre 2011.
Pour économiser 240 millions d'euros, le gouvernement a aussi fait voter la non-rétroactivité du versement des allocations-logement (elles sont maintenues pour les logements sociaux).
En revanche, la prestation accueil du jeune enfant (Paje, 178 euros/mensuels) sera toujours versée à partir de la naissance de l'enfant, et non du mois suivant.