La consommation des ménages, moteur traditionnel de la croissance française, est repartie à la baisse en octobre, une tendance qui devrait se poursuivre en 2011 selon des prévisions de croissance inférieures à celles du gouvernement, sur fond de chômage toujours élevé.
Les dépenses de consommation des ménages français en produits manufacturés enregistrent une baisse de 0,7% en octobre par rapport au mois précédent, alimentée par une diminution des achats automobiles, en raison de la fin progressive des primes gouvernementales à la casse, selon les chiffres de l'Institut national de la Statistique et des Etudes économiques publiés vendredi.
L'automobile a chuté de 4,4% après une hausse de 11,3% en septembre, faisant baisser les dépenses en biens durables de 1,7%, après une forte hausse en septembre (plus 4,7%). La baisse s'élève à 7,6% sur un an.
"Cette décrue était évidemment prévisible, dans la mesure où elle ne fait que dupliquer les évolutions observées en 1996-1997 lors des dernières primes à la casse", résume Marc Touati, d'Assya Cie Financière. Les consommateurs ont en fait anticipé leur projet de changement de voiture, ce qui explique que cette vague d'achats soit suivi d'un recul, poursuit-il.
Selon lui, "la descente aux enfers devrait s’accélérer, avec des glissements annuels qui pourraient atteindre les moins 20 % en décembre".
L'annonce du gouvernement du prolongement du bonus pour les voitures moins polluantes achetées - et non plus livrées - avant la fin de l'année ne devrait pas changer profondément la donne.
Les achats en équipement du logement ont augmenté légèrement par rapport à septembre (plus 0,6%). Mais la baisse de 0,4% des achats de textile-cuir, après leur légère augmentation de septembre (plus 0,2%), montre que les consommateurs "ne sont pas enclins à dépenser sans compter", selon Marc Touati.
Ils devraient encore limiter leurs achats en novembre, en prévision de leurs dépenses des fêtes de fin d’année et des soldes de janvier qui devraient s’avérer appréciables, mais pas euphoriques, ajoute-t-il.
Et si la consommation des ménages a augmenté de 1,2% sur l'ensemble du troisième trimestre par rapport au trimestre précédent, elle chute de 0,3% en octobre en glissement annuel, relèvent des analystes.
"Rien ne va plus dans le ciel conjoncturel français", analyse Marc Touati. Après le recul de deux points du moral des industriels en novembre, "c’est au tour de la consommation de déraper", souligne-t-il, estimant qu'il "faut se préparer à une faiblesse durable de la consommation hexagonale".
Ce constat est partagé par Alexander Law, du cabinet Xerfi. "Le chiffre de ce jour constitue une correction attendue après le rebond en trompe l'oeil de septembre", estime-t-il.
Selon lui, même s'il y a eu des facteurs aggravants en octobre avec les mouvements sociaux et les pénuries ponctuelles de carburant, les freins à la consommation "vont bien au-delà : le chômage continue de progresser tandis que le pouvoir d’achat n’avance que par à-coups".
Il estime que "les interrogations restent légion quant à la capacité de la consommation à se maintenir au cours des prochains mois" et table "sur une toute petite croissance en 2011".
Compte tenu d’une progression également molle de l’investissement des entreprises, "la croissance hexagonale devrait donc avoisiner les 1,6% cette année et les 1,8% l’an prochain", renchérit Marc Touati. L'Etat table lui sur une croissance de 1,6% en 2010 et de 2% en 2011.
Dans ces conditions, l’emploi "restera faiblard et le déficit public toujours proche des sept pour cent du PIB. A l’évidence, si la France est bien sortie de la récession, elle reste engoncée dans la mollesse économique", conclut-il.