Le Premier ministre portugais a assuré la survie de son gouvernement grâce à un accord avec son partenaire de coalition mais l'accord reste soumis à l'approbation du président et suscite déjà de sérieux doutes.
Au terme d'intenses négociations, Pedro Passos Coelho est parvenu à un accord avec Paulo Portas, le chef du petit parti conservateur CDS-PP, dont l'alliance avec le Parti social démocrate du chef du gouvernement assure à la coalition de centre-droit, au pouvoir depuis 2011, la majorité au Parlement.
La survie de la coalition ne tenait qu'à un fil après la démission surprise de M. Portas de son poste de ministre des Affaires étrangères.
Même si le ministre avait présenté son départ comme "irrévocable", M. Passos Coelho l'a promu au poste de vice-Premier ministre et l'a même chargé de "coordonner les politiques économiques et les relations avec la +troïka+", représentant les créanciers du pays qui bénéficie depuis mai 2011 d'un plan de sauvetage de 78 milliards d'euros.
L'accord était d'autant plus urgent que les ministres des Finances de la zone doivent faire le point lundi à Bruxelles sur la situation au Portugal. Ils redoutent que la crise ne mette en péril le retour du pays sur les marchés financiers, prévu l'an prochain, à la fin du plan de sauvetage.
M. Passos Coelho a affirmé que la solution trouvée était "solide" et qu'elle permettait de "surmonter la situation politique délicate". Autant d'affirmations qui ont laissé les commentateurs sceptiques.
"Le gouvernement restauré peut-il mériter la confiance des Portugais", s’interrogeait ainsi le quotidien de référence Publico. "On ne peut croire à aucune des garanties présentées", renchérissait le sociologue Paquete de Oliveira dans les colonnes du Diario de Noticias.
L'opposition de gauche et sa principale formation, le Parti socialiste, se montrait virulente. "La survie du gouvernement n'est pas une solution : c'est un cauchemar pour les Portugais", estimait le chef du PS Antonio José Seguro en ajoutant: "Plus personne n'a confiance en ce gouvernement ni en la parole de ses principaux dirigeants".
Une apparente victoire
M. Passos Coelho a pourtant assuré qu'en chargeant M. Portas, qui avait critiqué l'excès de rigueur, de superviser la politique économique il comptait bien donner "la priorité à la relance et à l'emploi", alors que l'économie doit reculer cette année de 2,3% et le chômage atteindre le taux record de 18,2%.
M. Portas aura sous ses ordres Maria Luis Albuquerque dont il avait refusé la nomination au poste de ministre des Finances. Le choix de Mme Albuquerque pour remplacer Vitor Gaspar, dont la démission en début de semaine a été un des éléments de la crise, avait été interprété comme une indication claire que la politique de rigueur serait poursuivie malgré le mécontentement social qu'elle suscite.
M. Portas, qui n'a pas encore commenté son accord avec M. Passos Coelho, semble donc avoir remporté une victoire. Mais elle pourrait n'être qu'apparente dans la mesure où il aura du mal à imposer ses vues à la "troïka" des créanciers dont la rigueur budgétaire est l'unique credo.
M. Portas "a perdu sa marge de manoeuvre pour critiquer la politique du gouvernement", notait ainsi le quotidien Publico.
Le président Anibal Cavaco Silva, doit entériner l'accord en début de semaine après avoir entendu l'avis des différents partis politiques représentés au Parlement.
Selon diverses hypothèses, le chef de l'Etat aurait insisté pour un rééquilibrage au sein de la coalition au pouvoir, évitant ainsi d'avoir à convoquer des élections législatives anticipées alors que la "troïka" des créanciers doit en principe procéder dès le 15 juillet à un nouvel examen des comptes du pays.