La justice européenne a validé mardi le veto posé par l'UE il y a trois ans à une tentative de prise de contrôle de la compagnie irlandaise Aer Lingus par sa rivale Ryanair, mais a permis à la compagnie à bas prix de conserver la participation qu'elle y détient.
L'arrêt rendu par la Cour européenne de justice confirme deux décisions de la Commission européenne remontant à 2007. Il devrait mettre un terme à une longue lutte entre les deux compagnies aériennes d'Irlande.
Ryanair avait tenté de prendre le contrôle d'Aer Lingus lors de sa privatisation en 2006.
Son OPA lui a permis de porter sa participation à 29,3% du capital, mais l'exécutif européen, gardien des règles de saine concurrence, avait mis un terme à la tentative de prise de contrôle en la déclarant le 27 juin 2007 incompatible avec les règles du marché commun.
Il avait estimé que cela donnerait à Ryanair une position dominante en Irlande sur de nombreuses liaisons.
Dans la foulée, Aer Lingus avait alors demandé à la Commission européenne d'obliger Ryanair à céder sa participation, mais Bruxelles avait refusé car la participation détenue par Ryanair était minoritaire et ne lui permettait pas d'exercer un contrôle sur Aer Lingus.
Les deux compagnies rivales avaient saisi la Cour européenne de Justice qui les a toutes deux déboutées.
La Commission a "salué" mardi la décision de la juridiction de Luxembourg qui "rejette l'appel de Ryanair déposé en juin 2007", dans un communiqué.
"L'alliance de Ryanair et d'Air Lingus aurait créé une position dominante sur 35 liaisons aériennes, aux dépens de plus de 14 millions de passagers européens voyageant vers ou à partir de l'Irlande chaque année", a commenté le commissaire à la Concurrence, Joaquin Almunia.
"Je suis satisfait de voir que l'approche de la Commission concernant les fusions entre compagnies aériennes susceptibles de porter préjudice aux citoyens ait été validée par la Cour", a-t-il ajouté.
Les deux compagnies, pour leur part, ont fait bonne figure en se réjouissant toutes deux de l'arrêt rendu, mais pour des raisons différentes.
Le directeur général de Ryanair Michael O'Leary a "salué" dans un communiqué la confirmation que Ryanair "ne peut être forcée à vendre ses 29,8% dans Aer Lingus". La compagnie a indiqué pour le reste "étudier les détails de ce jugement de 125 pages".
M. O'Leary estime que les termes de la décision "n'empêcheront pas Ryanair de faire une nouvelle offre sur Aer Lingus, mais qu'une telle offre devra évidemment prendre en compte la décision détaillée de la Cour".
De toute façon, selon lui, Ryanair "n'a pas de projet immédiat de faire une troisième offre pour Aer Lingus, qui de toute façon aurait peu de chance de succès à moins que le gouvernement irlandais ne décide de vendre les 25% qu'il possède" dans la compagnie.
Il souligne au passage qu'en préférant le célibat, Aer Lingus est "devenue une petite compagnie régionale périphérique avec un trafic, une flotte et des emplois en baisse, et connaît des pertes substantielles".
Dans une réaction symétrique, Aer Lingus "salue le jugement" qui valide l'interdiction opposée à la tentative de rachat de Ryanair en 2007, et elle "va étudier en détail" la partie permettant à Ryanair de conserver ses 29,8%.
Son président Colm Barrington estime que le jugement "confirme qu'un rachat (de la compagnie) par Ryanair serait mauvais pour les consommateurs et amènerait des prix plus élevés sur les destinations irlandaises".
Mais il a jugé "regrettable que la Cour n'ait pas saisi cette occasion de faire le pas supplémentaire nécessaire pour régler les effets anti-concurrentiels produits par la part minoritaire de Ryanair dans Aer Lingus".