Pour la première fois depuis plus de vingt ans, EDF, lourdement endetté et à la recherche d'argent frais pour investir, lance mercredi un emprunt obligataire auprès des particuliers qui devrait lui rapporter au moins un milliard d'euros.
L'opération permettra de souscrire à des obligations d'une valeur de 1.000 euros et d'une durée de 5 ans.
EDF n'a fixé aucun plafond de montant à lever, mais il juge que la somme d'un milliard d'euros serait "raisonnable".
Certains analystes prédisent à l'emprunt un "succès" compte tenu selon eux de "l'image de marque d'EDF" auprès du grand public.
Du coup, si la période de souscription doit se terminer le 10 juillet, EDF se réserve la possibilité de la clôturer plus tôt, avec un préavis de 24 heures, en cas de demande trop importante.
C'est la première fois depuis plus de vingt ans que le groupe lance un emprunt obligataire auprès des particuliers. Sa dernière opération de ce type, qui devait financer les premières centrales nucléaires, remonte au milieu des années 80.
Son PDG, Pierre Gadonneix, a justifié ce choix en jugeant "légitime de s'adresser aux Français pour investir en France".
Selon le groupe, les fonds levés serviront à "investir massivement". EDF est "reparti pour 10-15 ans de programme d'investissements importants", a justifié M. Gadonneix lors de l'annonce de l'opération fin mai.
Sur la seule année 2008, le groupe a investi 9,7 milliards d'euros, dont un peu plus de la moitié (5,2 milliards) en France.
Et en 2009, il devrait accroître ses investissements dans l'Hexagone de 44%, à 7,5 milliards d'euros, dont 2,5 milliards dans le cadre du plan de relance de l'économie.
Mais EDF doit aussi faire face à une explosion de son endettement: au fur et à mesure de très importantes acquisitions, celui-ci a augmenté de 50% rien qu'en 2008, pour atteindre 24,5 milliards d'euros en fin d'année.
EDF a en particulier acheté l'exploitant britannique de centrales nucléaires British Energy pour plus de 13,5 milliards d'euros, ainsi que la moitié des activités nucléaires de l'américain Constellation Energy pour 3,5 milliards, une opération pour l'instant bloquée par les autorités américaines.
EDF a aussi acquis récemment une part majoritaire dans le capital du deuxième producteur d'électricité belge, SPE, pour 1,3 milliard d'euros.
Pour tenter de remédier à son endettement, le groupe doit, outre l'emprunt, engager cette année "un programme de cessions de plus de 5 milliards d'euros".
Certains syndicats ont accueilli avec prudence la perspective de l'opération auprès des particuliers.
La CGT Energie a demandé qu'elle ne se traduise pas par des hausses de tarifs de l'électricité, et plaidé pour que l'usage des fonds levés soit strictement contrôlé.
Le syndicat est "contre tout emprunt qui servirait à couvrir des achats coûteux à l'international, comme British Energy ou Constellation", mais ne s'oppose pas à ce que la somme récoltée puisse alimenter "des investissements qui répondent aux besoins des populations en France, voire en Europe".
De l'avis de certains experts, cet emprunt auprès du grand public pourrait remettre au goût du jour ce type d'opération, à la mode dans les années 70 et 80, mais qui avait progressivement disparu, la demande des particuliers ayant été détrônée par celle, croissante, des investisseurs institutionnels.