La pression s'accroît sur la Caisse d'Epargne, déjà épinglée par la Direction des Fraudes pour "Doubl'ô", un placement censé doubler le capital investi en 6 ans, et dont l'une des caisses régionales vient d'être mise en examen pour "publicité trompeuse".
Un retraité de Saint-Etienne a en effet porté plainte contre la Caisse d'épargne de Loire-Drôme-Ardèche, qui a commercialisé, comme toutes les caisses régionales, le fonds de placement "Doubl'ô", à la fin 2001 et au début 2002, a-t-on appris lundi de source judiciaire.
Le retraité, comme des centaines de milliers d'autres épargnants, espérait voir son capital doublé au bout de six ans, comme le faisait miroiter la plaquette publicitaire. In fine, il n'a récupéré que le capital, amputé des frais de gestion.
Cette mise en examen d'un établissement régional sur le dossier "Doubl'ô" laisse "espérer" que la Caisse d'Epargne va négocier au niveau central une "indemnisation" pour ses clients, a lancé Serge Maître, secrétaire général de l'Association Française des Usagers des Banques (AFUB).
Selon l'association de défense des consommateurs, il faudrait que la Caisse d'Epargne verse à ses clients ce qu'ils auraient touché s'ils avaient laissé l'argent sur un plan d'épargne.
Interrogée à ce sujet, la Banque populaire Caisse d'Epargne (BPCE) a répondu que chaque Caisse régionale était "autonome" et qu'il appartenait à chacune de régler ses litiges.
"Doubl'ô" a suscité de multiples plaintes et actions depuis 2007, date à laquelle il est arrivé à échéance. Certains épargnants ont préféré négocier avec la banque pour obtenir réparation, d'autres ont attaqué devant le tribunal civil.
Cette fois-ci, il s'agit d'une plainte au pénal pour tromperie, avec constitution de partie civile.
Selon les avocats en charge de plusieurs dossiers sur cette affaire, grâce à cette mise en examen, "les Caisses d'épargne vont devoir s'expliquer sur les raisons qui les ont amenées à s'engager sur un doublement du capital versé".
Le juge a un délai de 6 mois pour décider soit d'un non-lieu, soit d'un renvoi en correctionnelle.
Le Parquet de Paris a pour sa part également été saisi du dossier la semaine dernière par la Direction des fraudes, qui elle aussi avait estimé qu'il y avait "publicité trompeuse".
Le produit Doubl'ô a été vendu à quelque 240.O00 clients des Caisses d'Epargne, ayant investi en moyenne chacun quelque 25.000 euros, selon l'AFUB.
Ces chiffres n'ont pas été confirmés par la Caisse d'Epargne, qui plaide non coupable. Selon elle, la banque ne s'était engagée que sur un point, le remboursement du capital investi, et cet engagement a été "tenu", selon l'avocat de la banque, ce qui est "plutôt rare dans une période marquée par beaucoup de volatilité".
Et d'ajouter que "plusieurs décisions de justice ont déjà donné raison aux Caisses d'Epargne et la banque est confiante de convaincre" désormais le Parquet de Paris.
La Caisse d'Epargne a déjà été désavouée en justice sur un autre produit, celui des "Fonds Ecureuil", un fonds de placement investi en bourse. Selon la plaquette publicitaire, l'investisseur n'avait "pas à s'inquiéter des évolutions des marchés financiers". Un épargnante de 65 ans avait placé 7.650 euros sur ce produit, qui faisait miroiter des gains de 21% en 3 ans selon elle. Après avoir été déboutée en appel, la cliente a gagné en cassation en 2008.