Face aux incertitudes persistantes pour l'économie de la zone euro, la Banque centrale européenne (BCE) devrait conserver jeudi ses taux directeurs inchangés lors de son dernier conseil régulier avant la pause estivale.
Le conseil des gouverneurs se réunit à Francfort (ouest de l'Allemagne). Les économistes interrogés par l'agence Dow Jones Newswires misent à l'unanimité sur un nouveau statu quo monétaire.
Le principal taux directeur, baromètre du crédit en zone euro, devrait donc rester à 1%. Il s'est posé à ce niveau historique en mai, après être descendu à vive allure les mois précédents. En octobre, il plafonnait encore à 4,25%.
"La récession et la désinflation maintiennent les taux à leur bas niveau", souligne Alexander Krüger, économiste à la banque allemande Bankhaus Lampe.
Les perspectives pour la conjoncture paraissent s'éclaircir, si l'on se fie aux récents indices de confiance aussi bien de l'économie que des ménages. Mais la sortie de crise s'annonce laborieuse, et la croissance, quand elle reprendra, promet d'être molle.
Dans le doute, "la BCE va garder la porte ouverte à de nouvelles baisses de taux directeurs", estime M. Krüger.
Les gardiens de l'euro prédisent un retour à des taux positifs de croissance trimestrielle à la mi-2010. Mais ce scénario reste soumis à plusieurs risques.
La déflation, un recul généralisé et durable des prix paralysant pour l'économie, est l'un d'entre eux. Le Fonds monétaire international (FMI) a récemment estimé que la menace, bien que légère, était présente, ce que la BCE rejette pour le moment.
Les prix à la consommation ont reculé sur deux mois consécutifs: -0,1% en juin sur un an, -0,6% en juillet. La baisse record de 6,6% en juin des prix à la production industrielle, annoncée mardi, a de quoi alimenter les craintes d'une spirale à la baisse des prix.
Mais pour la BCE, la flambée des cours du pétrole l'an passé explique en grande partie ce phénomène, qui devrait se normaliser en cours d'année.
Une pénurie du crédit est un deuxième grand danger qui pourrait aggraver la récession. La récente enquête trimestrielle de l'institution a montré que les banques continuaient à durcir leurs conditions de prêt, rechignant à prendre de nouveaux risques alors que la solvabilité de leurs clients est rendue plus fragile par la crise et qu'elles traînent toujours le boulet de leurs actifs toxiques.
L'institution les abreuve de liquidités très bon marché afin de les inciter à prêter suffisamment pour éviter à l'économie de s'asphyxier.
Mais la croissance du crédit continue de fondre à vue d'oeil, avec +1,5% seulement en juin sur un an, selon les dernières statistiques.
Il est "réaliste de penser" que toutes les mesures exceptionnelles prises par la BCE, dont le rachat d'obligations sécurisées, vont prendre du temps avant de faire effet, estime la Royal Bank of Scotland dans une note.
Même si la perspective d'une relance reste lointaine, les gardiens de l'euro ne manqueront sans doute pas d'évoquer de nouveau des stratégies de sortie de crise.
Il s'agira d'abord de résorber les liquidités en surabondance sur le marché, puis réaugmenter les taux d'intérêt, dans l'objectif d'éviter une surchauffe inflationniste. Le plus délicat sera de choisir le bon moment.
Ben Bernanke, le président de la Réserve fédérale américaine, a récemment lui aussi promis que les taux allaient remonter aux Etats-Unis. Mais pas avant longtemps.