Le projet de fusion entre EADS et BAE Systems pourrait connaître une accélération cette semaine avec une réunion des ministres de la défense allemand, britannique et français à Chypre destinée à élaborer une position commune face aux industriels.
"Une première discussion tripartite au niveau des ministres de la Défense aura lieu à Chypre sur le dossier EADS/BAE mercredi ou jeudi", a annoncé lundi à l'AFP le conseiller du ministre français.
"Jean-Yves Le Drian avait prévu d'être présent à une réunion informelle des ministres de la Défense de l'Union européenne à Chypre. (...) il réunira autour de lui ses homologues britannique Philip Hammond et allemand Thomas de Maizière", a-t-il ajouté.
Cette annonce intervient après que le Premier ministre britannique David Cameron s'est entretenu avec le président français François Hollande lundi. Il avait déjà discuté du dossier avec la chancelière allemande Angela Merkel vendredi.
Interrogé, EADS n'a pas souhaité faire de commentaire.
Le 12 septembre, EADS -maison mère du constructeur Airbus- et le britannique BAE -fabricant de chars, navires, et porte-avions, avaient révélé être en négociations pour fusionner et créer le numéro 1 mondial de l'aéronautique et de la défense devant l'américain Boeing.
Selon les termes du projet, EADS détiendrait 60% du futur groupe, BAE 40%.
Cette fusion aux enjeux stratégiques et sociaux ne peut se concrétiser sans l'aval des Etats, en particulier de l'Etat français actionnaire d'EADS à hauteur de 22,35% par la biais de la Sogeade.
Selon la réglementation boursière britannique, les industriels ont jusqu'au 10 octobre pour conclure leur rapprochement ou l'abandonner. Ils peuvent également demander une prolongation du délai de négociations, ce que les industriels souhaitent éviter.
Extrême sensibilité
Les Etats sont jusqu'alors restés sur leur réserve, arguant de l'extrême sensibilité du dossier.
Londres et Paris sont particulièrement attentifs aux clauses relatives aux activités de Défense.
Sur le nucléaire britannique, l'idée évoquée est de "sanctuariser" cette activité, avec des garde-fous garantissant que Français et Allemands n'y aient aucun accès, à la manière du missile nucléaire français M51, construit par une filiale d'EADS mais sous supervision exclusivement française.
Les Britanniques redoutent également de voir BAE Systems passer sous domination étrangère avec le risque de remettre en cause les relations privilégiées anglo-américaines dans la défense.
La commission de la Défense du parlement britannique a d'ailleurs annoncé lundi qu'elle allait enquêter sur ce projet de fusion pour évaluer l'impact d'un tel rapprochement sur la défense du Royaume-Uni ou encore ses liens avec les Etats-Unis.
A Berlin, on redoute surtout que le rapprochement avec BAE se traduise par une restructuration de Cassidian, le pôle défense d'EADS, principalement basé en Allemagne.
Si ce projet est complexe, il pourrait aussi donner un coup de pouce aux politiques désireux de concrétiser l'Europe de la Défense.
La semaine dernière, Jean-Yves le Drian et Thomas de Maizière s'étaient par ailleurs réunis à Paris. Mais il s'agissait alors de préparer une réunion entre Angela Merkel et François Hollande.
Samedi en Allemagne, ces derniers avaient déclaré ne pas avoir pris de décision tout en promettant de se prononcer dans les délais impartis.
M. Hollande avait résumé les enjeux en quatre points: emploi, stratégie industrielle, activités de défense et intérêts des Etats respectifs.
Si les ministres de la Défense parviennent cette semaine à faire émerger une position commune, il reviendra, in fine, au plus haut niveau des Etats de donner l'aval.
Lundi, EADS, confiant, a jugé les discussions productives.