La France a réaffirmé mardi qu'elle "fera" la taxe sur les transactions financières, de préférence à l'échelle européenne, mais seule si elle ne parvenait pas à surmonter le scepticisme de ses partenaires de l'UE.
"A l'évidence, la France doit le faire avec les autres. Mais si la France attend que les autres se décident pour taxer la finance, la finance ne sera jamais taxée", a de nouveau insisté le président Nicolas Sarkozy depuis Mulhouse, où il présentait ses voeux à "la France solidaire".
"La France ne se contentera pas d'en parler, elle le fera", a-t-il répété.
Le chef de l'Etat s'exprimait au lendemain d'un sommet franco-allemand qui avait vu la chancelière Angel Merkel l'assurer de sa volonté "personnelle" de taxer les transactions financières, mais reconnaître l'absence de "consensus" sur cette question au sein de son gouvernement.
Membre de sa coalition, le petit parti libéral (FDP) a encore rejeté mardi l'idée d'une taxe limitée à la seule zone euro, évoquée par la chancelière.
"La France sera le premier pays, cette année, à mettre en oeuvre la taxe sur les transactions financières", a assuré le ministre de l'Economie, François Baroin, devant l'Assemblée nationale.
Candidat du PS à l'Elysée, François Hollande s'est de nouveau dit favorable au principe de cette taxe mais attend d'en connaître "le taux et les modalités" avant de décider de la voter à l'Assemblée.
M. Baroin a rappelé qu'il se rendrait jeudi à Berlin pour discuter avec son homologue allemand, Wolfgang Schäuble, "des modalités pratiques de la coopération franco-allemande", ses "objectif et calendrier".
Pour lui, le système financier doit "réparer les dommages qu'il a lui-même causés avec le développement d'une industrie financière qui s'est emballée".
"Poste avancé"
Le ministre a fait un parallèle avec le "succès" de la "taxe de solidarité sur les billets d'avions, voulue par Jacques Chirac, et qui concoure depuis quelques années à l'achat de médicaments contre le sida ou le paludisme destinés aux pays pauvres.
Porte-parole du gouvernement et ministre du Budget, Valérie Pécresse a souligné que Paris entendait "enclencher" le mouvement, tout en concédant que "cette taxe n'a de sens que si elle est portée par l'Europe". "Si la France la met en place seule, évidemment, à terme, elle sera contournée", a reconnu la ministre.
Sur le calendrier législatif, le tandem Baroin-Pécresse a laissé ouverte la possibilité de raccrocher la taxe au collectif budgétaire qui sera débattu en février au Parlement.
Selon le ministre de l'Economie, elle devrait frapper "les actions, les obligations, les mouvements autour des (produits financiers) dérivés", soit une assiette "large" avec des taux "relativement bas", au "plus près" de la proposition de la Commission européenne.
Celle-ci pourrait cependant se heurter au scepticisme de la présidence danoise de l'Union européenne, qui a rejeté mardi le texte "pas très solide" discuté actuellement par les Vingt-Sept et mis en garde contre un cavalier seul de la zone euro tel qu'évoqué par Paris et Berlin.
La proposition de la Commission, censée rapporter jusqu'à 55 milliards d'euros par an, prévoit des taux de prélèvement de 0,1% sur les actions et les obligations et de 0,01% sur les autres produits financiers, essentiellement les dérivés et produits structurés.
Des dispositions semblables, dénichées par Le Canard enchaîné, existent d'ores-et-déjà dans le Code des impôts français. Votées en décembre 2001 à l'initiative de l'ex Premier ministre Lionel Jospin pendant la cohabitation, elle portent toutefois sur les seules devises et n'ont jamais été appliquées.