Le Fonds monétaire international a salué vendredi la politique de relance du nouveau gouvernement japonais de Shinzo Abe mais l'a pressé d'adopter des réformes structurelles sous peine d'entraîner des "risques considérables" pour l'économie nippone.
"Les autorités ont lancé un ambitieux programme" pour doper l'activité de la troisième puissance économique mondiale qui "fournit une occasion d'en finir avec de longues années de déflation et de croissance faible", a souligné le FMI dans son rapport annuel sur le Japon.
Une équipe du Fonds dirigée par David Lipton, premier adjoint de la directrice, Christine Lagarde, est venue au Japon prendre le pouls des "Abenomics", surnom popularisé par les médias de la politique économique du Premier ministre.
Depuis son arrivée au pouvoir en décembre, M. Abe a poussé la Banque du Japon (BoJ) à assouplir considérablement sa politique monétaire, fait voter des budgets de relance et promis des réformes structurelles pour doper l'activité.
Le FMI a noté que la croissance avait "fortement rebondi au premier trimestre, tirée par la consommation et les exportations": "c'est un signe encourageant indiquant que la nouvelle politique porte ses fruits, bien que l'investissement n'ait pas encore repris".
Il a maintenu en l'état ses prévisions de croissance du Japon pour 2013 et 2014, qu'il avait relevées le mois dernier à respectivement 1,6% et 1,4%.
"Malgré ce bon départ, il y a des risques considérables", a toutefois prévenu l'organisation basée à Washington.
"Des réformes de soutien à la croissance décevantes qui ne parviendraient pas à augmenter l'investissement privé et l'emploi pourraient affaiblir la reprise et ralentir le retour à de l'inflation", a-t-il pointé.
M. Abe a promis d'annoncer un plan sur ce sujet dès le mois de juin.
"L'absence de mesures budgétaires concrètes pour réduire la dette publique, ou un report de la hausse de la taxe sur la consommation, augmenteraient le risque d'une augmentation des taux d'intérêts des obligations d'Etat, ce qui saperait la stabilité budgétaire et financière", a encore averti le FMI.
Lestée d'un déficit public de 9,8%, la dette du Japon pourrait atteindre 245% de son produit intérieur brut en 2013, d'après les estimations du Fonds.
Le passage de 5 à 10% de la taxe sur la consommation est prévue en deux étapes (avril 2014 et octobre 2015) si la croissance le permet, mais le FMI a appelé le Japon à élever plus tard cet impôt indirect à 15%.
"Le chantier des Abenomics ne fait que commencer. Les réformes pour la croissance et l'ajustement budgétaire qui doivent être présentées le mois prochain sont indispensables à la réussite de la stratégie", a souligné M. Lipton lors d'une conférence de presse.
Même si près de la moitié de son budget est financé par l'émission de dette supplémentaire, le Japon reste encore bien considéré par les agences de notations financières car ses obligations publiques appartiennent à plus de 90% à des investisseurs nippons. Les Japonais sont en outre les principaux détenteurs d'actifs étrangers au monde.
M. Lipton ne s'en est pas moins dit "inquiet" de la situation budgétaire du pays, l'appelant à lancer un plan crédible d'assainissement "dès que possible".
Le responsable du FMI a par ailleurs jugé que la récente dépréciation du yen, qui fournit un avantage compétitif aux produits japonais, n'était "pas problématique" si elle était accompagnée de ces réformes de structure attendues.
Le yen a chuté d'environ 25% face au dollar et à l'euro depuis le mois de novembre, les marchés attendant une politique monétaire beaucoup plus accommodante de la BoJ, finalement lancée début avril.