Les Européens sont tombés d'accord jeudi sur les grandes lignes d'un pacte pour renforcer la discipline budgétaire de la zone euro mais n'ont pas été aussi loin que certains le voulaient, au risque de susciter le doute quant à leur volonté de tirer les leçons de la crise.
Ce pacte budgétaire voulu à tout prix par l'Allemagne, qui en fait son cheval de bataille lors du sommet européen de décembre, faisait l'objet d'âpres négociations depuis plusieurs semaines. Il était discuté au niveau technique par de hauts fonctionnaires des pays de l'Union. Participaient également des représentants de la Commission et plusieurs parlementaires européens.
Trois ébauches de compromis ont ainsi été rédigés avant de parvenir à l'accord de principe annoncé jeudi soir par des négociateurs.
Le texte final de compromis doit encore être peaufiné avant d'être soumis aux ministres des Finances européens, puis aux chefs d'Etat et de gouvernement qui se retrouvent à Bruxelles le 29 janvier. Objectif: boucler les négociations à ce moment-là puis signer le texte lors du sommet européen de début mars.
Le calendrier pourrait toutefois s'accélérer, sous la pression de la Banque centrale européenne (BCE).
Son influent président, l'Italien Mario Draghi, a estimé jeudi qu'il "serait bon que ce pacte budgétaire puisse être adopté à la fin de ce mois, pas en mars".
Ce pacte budgétaire, auquel la Grande-Bretagne refuse de participer, prévoit l'instauration d'une "règle d'or" pour graver dans le marbre l'objectif de comptes publics équilibrés, ainsi que des sanctions financières quasi-automatiques lorsque les déficits dépassent 3% du PIB. Il est destiné aux pays de la zone euro et à ceux de l'UE souhaitant s'y associer.
Mais, "il reste encore des points litigieux à résoudre", a admis une source diplomatique, notamment pour certaines compétences de la Commission européenne.
Son rôle fait débat et a évolué au fil des discussions: il a un temps été envisagé qu'elle puisse saisir la Cour de justice européenne si un Etat ne respecte pas l'inscription d'une règle d'or dans sa Constitution ou dans un texte équivalent. Dans la dernière mouture du texte remise aux Etats mardi soir, ce rôle avait été amoindri, mais pourrait encore évoluer.
Autre point restant à trancher: le nombre de pays devant ratifier ce texte pour qu'il entre en vigueur. Ce seuil a d'abord été fixé à neuf (la majorité des 17 pays de la zone euro), avant d'être remonté à 15 puis redescendu à 12.
Quoi qu'il advienne, le texte dont devraient accoucher les Européens promet d'être moins sévère que prévu. Certains pays ont en effet bataillé dur pour ne pas se voir imposer une discipline de fer.
Résultat: les prérogatives de la Cour de justice européenne et de la Commission, en particulier en matière de surveillance, sont appelées à être limitées par rapport à ce qui avait été un temps envisagé.
La France a notamment ferraillé pour que le rôle de la Cour européenne de justice soit circonscrit et qu'elle ne puisse pas vérifier l'ensemble de la politique budgétaire d'un Etat. Elle devrait vérifier uniquement l'application des règles d'or.
Lourdement endettée, l'Italie a obtenu que les sanctions quasi-automatiques ne s'appliquent qu'en cas de dépassement du plafond retenu pour les déficits publics et non pour la dette, comme cela fut envisagé.
Reste désormais à savoir si ce nouvel instrument de discipline sera suffisamment crédible aux yeux des marchés financiers.