Moins de soldats mais une armée à la pointe de la technologie, avec les yeux fixés sur l'Asie et le Moyen-Orient: le chef du Pentagone Leon Panetta a présenté jeudi ses orientations budgétaires, reflets de l'austérité qui attend la défense américaine ces prochaines années.
Alors que le pays est confronté à un déficit public abyssal, le Congrès impose au Pentagone de trouver 487 milliards d'économies au cours des dix prochaines années.
"Nous sommes à un tournant stratégique après une décennie de guerre et une augmentation substantielle de nos dépenses", a déclaré le secrétaire à la Défense en préambule d'une conférence de presse où il a présenté ses orientations budgétaires.
Elles s'appuient sur la nouvelle stratégie dévoilée au début du mois par le président Barack Obama qui érige l'Asie-Pacifique et le Moyen-Orient comme priorités et rejette les longues et coûteuses opérations de contre-insurrection, comme en Irak et en Afghanistan.
L'armée de Terre va donc perdre 13% de ses effectifs en passant de 565.000 hommes à 490.000 d'ici 2017 et le corps d'élite des Marines passer de 201.000 à 182.000 hommes. Les forces terrestres perdront au total près de 100.000 hommes mais resteront plus nombreuses qu'en 2001.
Dans ce cadre, deux brigades de combat sur les quatre basées en Europe, comptant plus de 7.000 militaires, seront rapatriées ou supprimées.
Les Etats-Unis resteront cependant "capables de vaincre n'importe quel adversaire sur terre", a assuré M. Panetta, rappelant que l'accent sera mis sur les investissements dans les satellites, drones et autres technologies d'observation ainsi que les forces spéciales.
"Nous avons fait en toute conscience le choix de ne pas maintenir plus d'effectifs que nous ne pouvons nous permettre d'entraîner et d'équiper correctement", a plaidé le ministre.
Quelque 90.000 militaires américains sont toujours déployés en Afghanistan. La réduction d'effectifs s'effectuera essentiellement après le retrait des forces du pays en 2014.
Corollaire de ces décisions, il n'y aura plus besoin d'autant de bases sur le territoire américain et une commission du Congrès devra être instaurée pour identifier les implantations à supprimer.
L'armée de l'Air perdra six de ses 60 escadrons d'avions de combat, soit environ 120 appareils, la flotte de transport aérien sera réduite et des vieux navires seront retirés du service.
Les coupes budgétaires commenceront à affecter le Pentagone dès l'exercice 2013, qui débute en octobre. M. Panetta a dévoilé que le projet de budget, qui sera officiellement présenté le 13 février, est en baisse de 9% par rapport à celui soumis l'an passé.
Il s'élève à 525 milliards pour le budget "de base", auquel s'ajoutent 88,4 milliards pour la guerre en Afghanistan.
Les orientations budgétaires font la part belle aux moyens d'agir dans la zone Asie-Pacifique, notamment face à la montée en puissance de la Chine.
"Ce budget protège, et dans certains cas augmente, les investissements qui sont cruciaux pour notre capacité à projeter notre puissance en Asie et au Moyen-Orient", a estimé Leon Panetta.
Les fonds pour la mise au point d'un nouveau bombardier furtif à long rayon d'action seront préservés, de même que les 11 porte-avions.
Le programme F-35, le futur avion de chasse furtif, demeure "essentiel", selon M. Panetta, mais une partie des achats sera reportée.
Le Pentagone lance par ailleurs un nouveau programme ambitieux de "base avancée flottante": une sorte de barge géante capable de déployer des drones, hélicoptères et forces spéciales ou encore d'héberger un hôpital ou de stocker des équipements.
L'influent sénateur républicain John McCain a fait part de son inquiétude sur l'ampleur de coupes "qui risquent de répéter les erreurs du passé en laissant nos forces insuffisantes pour répondre efficacement à des crises potentielles dans les prochaines années".
Il s'agit essentiellement de réductions dans la progression des dépenses, a relativisé Miriam Pemberton, experte à l'Institut pour les études politiques.