Bruissant de rumeurs, toutes démenties, les places financières mondiales n'ont cessé mardi de faire le yo-yo et les investisseurs se sont trouvés plongés dans une période de très grande incertitude économique.
"En période d'incertitude, les fondamentaux comptent peu. Qu'est-ce qui compte quand vous investissez ? Ce n'est pas ce qui se passe aujourd'hui, mais ce qui va se passer demain", résume Gunther Capelle-Blancard, directeur-adjoint du Centre d'Etudes prospectives et d'Informations internationales (CEPII).
"Dans ce petit jeu, les rumeurs prennent rapidement une place énorme", explique-t-il auprès de l'AFP.
La journée de mardi a ainsi encore été marquée par le poids des spéculations sur les marchés, qui ont alterné gains et pertes au rythme des bruits de couloir, comme cela avait déjà été le cas au coeur de l'été.
Intervention de la Chine au secours de l'Italie, difficultés de la BNP Paribas à se financer en dollars et finalement "initiative franco-allemande" sur la crise grecque: les opérateurs ont eu à jongler avec des informations sensibles, qui ont toutes été rapidement démenties.
Les marchés européens ont évolué au rythme de ces rumeurs: ouverture en hausse puis chute dans le rouge avant d'entamer un rebond. Les valeurs financières, en première ligne dans la crise actuelle, ont suivi la même tendance, en les amplifiant encore.
"En ce moment, on est dans l'émotion. La moindre rumeur peut déclencher un renversement de tendance. C'est la rumeur qui fait le marché", confirme Waldemar Brun-Theremin, gérant chez Turgot Asset Management.
"Sur des marchés aussi nerveux, la moindre rumeur prend des proportions très importantes. Tout va tellement vite que certains ne prennent même plus la peine de vérifier les informations", renchérit un gérant d'actions sous couvert d'anonymat.
Sur les banques, ajoute-t-il, "on sait que la situation est tendue en ce moment et c'est pour cela qu'elles sont autant touchées par ce phénomène".
Selon Waldemar Brun-Theremin, les outils de communication récents comme les réseaux sociaux ne portent pas de part de responsabilité dans la diffusion des rumeurs même si elles y fleurissent.
"On ne peut pas rendre Twitter responsable de ce qui se passe. L'information a toujours circulé et il faut juste vérifier sa véracité", assène-t-il.
"Ca fait 10 ans qu'il y a internet et que tout va très vite. Ca ne date pas de 2008", renchérit Gunther Capelle-Blancard, qui ajoute: "Les rumeurs sont aussi vieilles que les marchés eux-mêmes".
En revanche, les intervenants des marchés interrogés par l'AFP jugent que les amplitudes extrêmes des derniers jours s'expliquent en partie par les nouveaux moyens technologiques comme le trading haute fréquence, qui permet à des ordinateurs de passer très rapidement des volumes conséquents d'opérations à partir d'informations reçues électroniquement et qui est très répandu chez les fonds spéculatifs.
"Ce sont tous ces algorithmes et ces logiciels qui rajoutent de la volatilité sur les marchés", confie un autre gérant sous couvert d'anonymat.
L'autre élément qui fait le jeu de la rumeur pour M. Brun-Theremin, c'est "la cacophonie qui règne au niveau politique".
"Si on avait une base plus claire et plus solide, les rumeurs ne prendraient pas comme elles prennent aujourd'hui. Si elles ont un tel impact, c'est parce qu'on est dans le flou", regrette-t-il.