Le climat du sommet qui réunit lundi patronat et syndicats à l'Elysée, pour faire le point des mesures anti-crise, s'annonce sombre, après la décision de François Fillon de "réexaminer" les dépenses sociales, perçue comme "un plan de rigueur pendant trois ans" par les organisations syndicales.
Cette rencontre, qui ne portera pas sur les retraites, devrait déboucher sur la prolongation d'aides aux entreprises pour le soutien de l'emploi, arrêtées en février 2009. En revanche, les syndicats sont pessimistes sur la reconduction des aides aux ménages modestes et aux salariés précaires.
La réunion survient alors que les syndicats, en partie désunis, fourbissent leurs armes en vue de la révision, sans doute à la baisse, des régimes de pensions.
Cinq d'entre eux (CGT, CFDT, FSU, Solidaires et Unsa) ont annoncé jeudi une journée "de grèves et de manifestations" le 27 mai qui portera, outre les retraites, sur l'emploi et les salaires. FO a appelé séparément à "une grève interprofessionnelle" le 15 juin, uniquement sur les retraites.
Les Cinq réclament "une relance économique intégrant la satisfaction des besoins sociaux".
Tout le contraire du programme de François Fillon. Sur fond de crise financière en Europe, le Premier ministre a affirmé jeudi que, pour réduire les déficits, les dépenses de l'Etat seraient "gelées en valeur" pour les trois ans à venir et que, entre autres, les aides sociales et à l'emploi seraient soumises à "un réexamen".
Pour les syndicats, c'est "un plan d'austérité" qu'ils "condamnent", alors que le redémarrage de l'économie n'est pas assuré.
Malgré la montée en puissance des contrats aidés et la stabilisation, au moins momentanée, du chômage, la situation de l'emploi demeure alarmante, avec quatre millions de personnes inscrites comme demandeurs, dont près de 1,4 million depuis plus d'un an.
Selon Pôle emploi, il faudra attendre 2011 pour voir diminuer le chômage. Encore ne ferait-il que revenir fin 2011 au niveau de fin 2009.
En outre, le "plan rebond" pour les chômeurs en fin de droits (formations, allocation exceptionnelle), doté de 705 millions d'euros apportés par l'Etat et l'assurance chômage, n'est pas encore opérationnel.
Les syndicats insisteront lourdement sur le renforcement nécessaire des moyens de Pôle emploi, où trop d'inscrits sont livrés à eux-mêmes, disent-ils.
Selon Gabrielle Simon (CFTC), le gouvernement veut prolonger le dispositif "zéro charges" pour les très petites entreprises et favoriser le maintien des séniors en entreprise en développant le tutorat.
Ce syndicat s'attend plutôt à une prolongation des aides aux employeurs recrutant un apprenti, "au moins pour passer le cap de la rentrée scolaire".
Mais la réduction d'impôts dont ont bénéficié plus de trois millions de foyers modestes en 2009 pourrait faire les frais de la rigueur.
"On n'est pas naïfs sur les objectifs du sommet, c'est plus un outil de communication", souligne Maurad Rabhi (CGT), qui réclame "des mesures fortes pour la consommation".
L'ensemble des syndicats continue aussi de demander la remise en cause de la loi favorisant les heures supplémentaires, dans une période de chômage élevé. "On a un nombre important d'entreprises qui ont fait un plan social et qui aujourd'hui utilisent les heures supplémentaires, c'est scandaleux", s'insurge François Chérèque.