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LVMH contre Hermès: la guerre du luxe vire à la bataille de procédure

Publié le 29/05/2013 09:00

L'examen par l'Autorité des marchés financiers (AMF), le gendarme de la Bourse, de l'entrée surprisedu géant du luxe LVMH au capital d' Hermès, a tourné à la bataille de procédure vendredi, LVMH réclamant la nullité de cette procédure et mettant vivement en cause l'AMF.

"Nous demandons de déclarer la nullité de la procédure", parce qu'"il y a eu de graves violations" dans l'enquête et concernant les droits de la défense, et que "nous n'avons pas été mis en possibilité d'avoir un procès équitable", avait plaidé d'entrée l'avocat de LVMH, Georges Terrier, devant la Commission des sanctions de l'AMF.

Après délibéré, la Commission des sanctions de l'AMF a décidé de "joindre l'incident au fond", c'est-à-dire de ne se prononcer sur la validité de la procédure qu'au moment de sa décision.

L'audience, très attendue, s'était ouverte vers 10h45. Elle était suspendue jusqu'en début d'après-midi, dans l'attente d'une décision sur la nullité ou non.

LVMH, propriétaire de Louis Vuitton, Céline et autre Guerlain, soupçonné d'avoir préparé pendant des années secrètement son entrée au capital d'Hermès, est accusé d'avoir tardé à informer le marché d'une opération financière et de manquements comptables (articles 223-6 et 223-1 du règlement de l'AMF). Il encourt plusieurs millions d'euros d'amende.

Le samedi 23 octobre 2010, à la stupéfaction générale, le groupe dirigé par Bernard Arnault avait annoncé posséder 14,2% et bientôt 17,1% du sellier du Faubourg Saint-Honoré, coté en Bourse depuis 1993, mais détenu en majorité par les héritiers du fondateur Thierry Hermès.

Un coup de tonnerre dans le monde du luxe, rendu possible par le recours à des produits financiers dérivés dits "ELS" (equity linked swaps), calqués sur l'action Hermès. A l'époque, ces contrats échappaient à toute déclaration de franchissement de seuils boursiers (5%, 10%, 15%...) LVMH les a fait dénouer par ses banques en titres Hermès, et non en numéraire.

Hermès, le fabricant des sacs Kelly et Birkin et des célèbres carrés de soie, considère les procédés utilisés par LVMH comme "illicites" et espère "que la Commission des sanctions saura décourager le renouvellement d'un pareil maltraitement du marché", avait dit jeudi son patron Patrick Thomas à l'AFP.

Devant la Commission, LVMH a vivement attaqué la procédure.

Le vice-président de LVMH, Pierre Godé, a accusé les organes de poursuite de l'AMF d'avoir "sciemment dissimulé" des éléments pour "maintenir leurs accusations sur des bases qu'ils savaient fausses".

Pas de plan de conquête de Hermès, assure LVMH

"LVMH attend de la Commission des sanctions qu'elle désavoue de telles pratiques, qu'elle mette à néant une enquête fondamentalement biaisée et restaure ainsi l'image d'intégrité de LVMH, de ses dirigeants et de ses collaborateurs", a lancé M. Godé.

Et de fustiger au passage une "campagne de dénigrement et de calomnie" de Hermès, "très préjudiciable" pour LVMH.

L'avocat de LVMH, Me Terrier, s'est indigné de n'avoir obtenu que "hier soir" (jeudi, NDLR) un avis de l'AMF transmis le 2 octobre 2012 au parquet de Paris dans le cadre d'une plainte d'Hermès contre LVMH pour délit d'initié et manipulation de cours. Cet avis, dont copie a été fournie à la presse par LVMH, ne conclut à aucun délit de ce type.

En réponse, le rapporteur de l'AMF, Michel Pinault, désigné par la Commission des sanctions à l'issue de l'enquête, a estimé que "le caractère contradictoire de la procédure (avait) été formellement respecté" et laissé à la Commission des sanctions le soin de statuer sur "les parties de la procédure dont (il) n'est pas responsable".

Le collège de l'AMF, qui a notifié les griefs, "conclut au rejet de l'ensemble des moyens de nullité soulevés par la défense", a dit Audrey Micouleau-Kerting devant la Commission des sanctions.

La présidente de la Commission des sanctions, Claude Nocquet, a dit souhaiter "que cette séance soit exemplaire" et a prononcé une suspension de séance pour délibérer.

Dans cette affaire, LVMH estime n'avoir rien à se reprocher: ni plan de conquête de Hermès, ni manquements comptables, ni défaut d'information du marché. C'est la défense qu'il devait présenter vendredi. Le groupe affirme que c'est l'assèchement inattendu du marché du titre Hermès conjugué à une flambée du cours à l'été 2010 qui l'ont poussé à décider de dénouer ses ELS en actions Hermès et qui, ainsi, ont provoqué son irruption dans le sellier à hauteur de 17,1%.

Fin 2012, LVMH détenait 22,6% du capital de Hermès contre 72% environ pour la famille héritière.

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