Les ministres européens de l'Agriculture ont laborieusement dégagé un accord, tard mardi soir, pour réformer la Politique agricole commune (PAC), mais les ambitions initiales pour la rendre plus écologique et plus équitable ont été revues à la baisse.
Cet accord a été adopté par 25 des 27 Etats de l'UE, à l'exception de la Slovénie et de la Slovaquie, au terme de deux jours d'intenses négociations à Bruxelles.
Il ne reflète toutefois que la position du Conseil des ministres de l'UE sur ce dossier et sera discuté dès le mois d'avril avec la Commission et le Parlement européen, qui a de son côté approuvé son propre projet de réforme le 13 mars.
L'Irlande, qui assure la présidence semestrielle de l'UE, espère aboutir à un compromis avant la fin de son mandat, en juin, avec l'objectif d'une entrée en vigueur de la réforme en 2015.
"C'est un grand pas en avant. On va vers un accord sur la réforme de la PAC", a déclaré le ministre irlandais de l'Agriculture, Simon Coveney, lors d'une conférence de presse.
"Cela n'a pas été facile, des pays ayant différentes priorités", a-t-il ajouté, évoquant "la négociation politique la plus complexe" à laquelle il ait jamais participée.
Si les ministres de l'Agriculture ont approuvé le principe de lier 30% des aides directes perçues par les agriculteurs au respect de certaines mesures vertes, ils ont prévu davantage de flexibilité et des exemptions aux règles sur le verdissement de la future PAC préconisées par la Commission européenne.
Dans son projet de réforme présenté en 2011, l'exécutif européen prône une diversification des cultures, le maintien de prairies permanentes et la mise en place de 7% de surfaces agricoles d'intérêt écologique. Ce dernier chiffre a été ramené à 5% par les Etats.
Les ministres n'ont pas abondé non plus dans le sens de la Commission qui souhaite rééquilibrer totalement les aides entre les agriculteurs au sein de chaque pays via un paiement uniforme à l'hectare dès 2019 (principe de "convergence interne"). Environ 80% des aides sont actuellement allouées aux plus grosses exploitations.
Divisés sur la question, les pays se sont finalement prononcés pour le maintien d'aides couplées à certaines productions afin de soutenir des secteurs en difficulté comme l'élevage laitier et la production de fruits et légumes. L'Allemagne était farouchement opposée à cette mesure, défendue notamment par la France, principale bénéficiaire de la PAC.
A la demande de Paris, les Etats auront la liberté de primer les premiers hectares de chaque exploitation agricole afin de favoriser les structures plus petites.
"Il y a des points dans votre approche générale que la Commission européenne ne peut pas accepter en l'état. Pour la convergence interne, l'ambition que vous avez mise sur la table n'est pas suffisante. Il est clair qu'il faudra aller plus loin", a prévenu le commissaire européen en charge du dossier, Dacian Ciolos, en s'adressant aux ministres.
"Il y a des choses qui ont bien avancé sur le verdissement, sur les zones d'intérêt écologique. Mais avec le texte que vous avez sur la table, le compte n'est pas encore là", a-t-il ajouté, tout en se réjouissant que les négociations sur la réforme de la PAC puissent désormais entrer dans leur "phase finale".
Le budget alloué à la PAC pour les sept prochaines années (2014-2020) a été réduit de 12%, à 373,2 milliards d'euros, mais l'agriculture reste le principal poste de dépenses de l'UE avec environ 38% du budget global.
Par ailleurs, l'accord prévoit de supprimer les quotas sucriers dès 2017, contre 2015 proposé par la Commission et 2020 par le Parlement, alors qu'approche la fin des quotas laitiers en 2015.