Des raffineries aux hauts-fourneaux lorrains, de l'automobile aux télécoms, en passant par les transports, plusieurs secteurs sont sous la menace de restructurations, illustrant une croissance en berne et la poursuite de politiques de réduction des coûts.
"Quand on sent un ralentissement dans un secteur en amont comme la sidérurgie, ça nous inquiète et c'est le cas actuellement", confie Gabriel Artero, le président de la CFE-CGC métallurgie, branche regroupant les principales filières industrielles (automobile, aéronautique, télécoms, etc.) et qui a vu ses effectifs tomber à 1,4 million de salariés (-12% depuis 2007).
Depuis des mois, l'avenir du site ArcelorMittal de Florange (Moselle) pose question à la suite de l'arrêt, a priori temporaire, du deuxième haut-fourneau à l'automne. La fermeture de l'aciérie voisine Gandrange en 2009 est dans toutes les têtes.
Après des mois d'incertitude, les syndicats espèrent un redémarrage au 2e semestre, qu'ArcelorMittal a conditionné à une reprise économique.
Or, les indicateurs à court terme ne vont pas dans ce sens.
Pour 2012, le FMI prévoit 0,5% de croissance en France, et moins 0,3% en zone euro. En avril, le moral des industriels français a reculé, l'Insee expliquant que "les carnets de commandes globaux se dégarnissent légèrement".
Dans ce contexte, "nous nous attendons à une recrudescence des destructions d'emplois", indique Mohamed Oussedik, en charge de l'industrie à la CGT. "Il faut rappeler qu'en dessous 1,9% de croissance, on détruit globalement de l'emploi", ajoute-t-il.
Selon lui, la construction et l'automobile seront particulièrement fragiles dans les mois à venir.
Pour PSA Peugeot Citroën et Renault, 2012 a mal commencé avec une baisse des ventes en France comme en Europe.
L'avenir du site d'Aulnay-sous-Bois en banlieue nord de Paris (Citroën C3) n'est à ce jour assuré que jusqu'en 2014 et les syndicats s'interrogent sur les conséquences de l'alliance PSA-General Motors scellée en février.
Dans l'automobile, déjà frappée par une saignée des emplois en 2009, "il y a des établissements en danger", pense Gabriel Artero (CFE-CGC), pour qui "la montée en charge de l'usine Renault de Tanger ne rassure pas". Le site marocain, inauguré cet hiver, a débuté la fabrication de véhicules "low-cost".
Le raffinage, qui souffre de surcapacité en Europe pour l'essence, n'a pas non plus fini se s'adapter, malgré la fermeture de Total à Dunkerque en 2010 et de Petroplus à Reischett (Bas-Rhin) en 2011. Aujourd'hui, les raffineries de Petit-Couronne (Seine-Maritime) et LyondellBasell (Bouches-du-Rhône) sont en sursis.
Autre secteur sujet à inquiétudes: les télécoms, tant du côté des équipementiers (Alcatel, ST-Microelectronics, etc.) que des centres d'appel, notamment à la suite de l'arrivée dans la téléphonie de Free qui a cassé les prix et situé son service clients par téléphone au Maroc. Technicolor veut fermer son usine de décodeurs d'Angers et SFR doit faire des annonces en juin.
"C'est un secteur en besoin d'investissements massifs", souligne Gabriel Artero.
Juin, c'est aussi le rendez-vous fixé par le PDG d'Air France pour annoncer son plan stratégique pour redresser la compagnie, après un premier volet d'économies en janvier et un gel des embauches.
Pour Pierre Ferracci, président d'Alpha, l'un des grands cabinets d'expertise pour les CE et de conseil en relations sociales, "il est évident qu'il va y avoir une vague de restructuration au second semestre". "On a toujours la pause électorale qui joue", explique-t-il, "avec cette année une pression du pouvoir politique peut être un peu plus forte car la conjoncture est plus dégradée qu'en 2007 et 2002".
Dans ce sombre tableau, "heureusement que l'aéronautique est là", relève Pierre Ferracci, "c'est un secteur porteur avec des carnets de commande bien garnis pour quelques années" et créateur d'emplois.