Trois semaines pour trouver une réponse "globale" à la crise de la dette, qui menace l'économie mondiale: la zone euro a promis de réussir là où elle a jusqu'ici échoué, mais les marchés attendent des solutions plus précises pour la Grèce et les banques.
Réunis dimanche à Berlin pour un nouveau sommet de crise, la chancelière allemande Angela Merkel et le président français Nicolas Sarkozy ont promis "des réponses durables, globales et rapides avant la fin du mois", sans toutefois en définir les contours.
Objectif affiché: arriver au sommet du G20 des principaux pays riches et émergents, présidé par la France à Cannes (sud-est de la France) les 3 et 4 novembre, avec une Europe "unie" qui ait résolu ses problèmes.
Et pour se donner davantage de temps, les Européens ont décidé de reporter au 23 leur sommet prévu à l'origine les 17 et 18 octobre, et de tout concentrer dans la journée de dimanche.
Le président américain Barack Obama a "apporté son entier soutien à la stratégie définie par la France et l'Allemagne pour parvenir à une solution globale permettant de rétablir la stabilité financière dans la zone euro", lors d'un échange téléphonique avec son homologue français, selon l"Elysée.
Après plusieurs rendez-vous manqués avec les marchés financiers, l'Europe espère cette fois frapper un grand coup pour stopper la contagion de la crise de la zone euro. Le précédent sommet des dirigeants de l'Union monétaire du 21 juillet, par exemple, a fait long feu.
"Attention, l'absence d'engagements forts tout de suite risque de décevoir", ont ainsi prévenu lundi les analystes du Crédit mutuel CIC.
Les réponses attendues portent notamment sur la recapitalisation des banques européennes, dont le principe a été acté après deux mois de tergiversations.
Cette décision a soulagé les marchés financiers, qui ont terminé en Europe en nette hausse après le rebond entamé en fin de semaine dernière, tout comme Wall Street, en forte hausse dans la matinée à New York, et les bourses asiatiques, qui ont rebondi mardi à l'ouverture.
Berlin a tardivement rallié Paris à une décision de principe sur la recapitalisation. Au-delà, les deux premières économies de la zone euro ont annoncé qu'elles proposeraient des "modifications importantes" des traités européens, un renforcement ultérieur du Fonds européen de stabilité financière (FESF), et une "solution durable" pour la Grèce.
Les Européens doivent donc revoir leur copie, trois mois seulement après avoir concocté, le 21 juillet, un plan global censé résoudre la crise grecque et endiguer sa propagation à l'Italie ou l'Espagne.
Ce plan n'a même pas encore été adopté par l'ensemble des Parlements des Dix-Sept: si Malte a donné lundi son feu vert, le vote mardi de la Slovaquie, dont la coalition au pouvoir demeurait divisée lundi soir sur ce sujet, risque de se transformer en veto qui paralyserait la zone euro.
"Le contenu reste flou" sur les futures solutions, déplore le Crédit mutuel CIC. "Nous ignorons toujours comment les Européens comptent recapitaliser les banques et surtout s'ils souhaitent toutes les recapitaliser afin d'éviter que certaines ne soient stigmatisées", ce qui ne serait "pas adapté", ajoute-t-il.
La Fédération bancaire française a en tout cas confirmé lundi son peu d'enthousiasme, jugeant que la solution à la crise viendrait d'un retour à la crédibilité des Etats et non d'un renforcement des fonds propres des banques.
La réforme des traités n'a pas non plus été détaillée et risque de se heurter à des résistances. Et la modification technique du FESF, afin qu'il ait une plus grande force de frappe, semble aussi opposer le couple franco-allemand: contre l'avis de Berlin, Paris souhaiterait le transformer en banque pour qu'il puisse se refinancer auprès de la Banque centrale européenne.
Surtout, aucune solution claire n'a été énoncée pour la Grèce, l'épicentre de la crise. Même si des signaux de plus en plus évidents indiquent que l'on se dirige vers un effacement de sa dette beaucoup plus substantiel que prévu jusqu'ici - d'où la nécessité de recapitaliser les banques, qui essuieront des pertes plus importantes. Le ministre grec des Finances Evangélos Vénizélos a dit de ce point de vue s'attendre à une "meilleure" participation du secteur privé que prévu lors du sommet européen du 21 juillet, dans le rééchelonnement en discussion de la dette grecque.
Dans une interview à la 2e chaîne de la télévision publique autrichienne ORF, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker a estimé lundi soir qu'une décote de plus de 60% pour les créanciers de la Grèce était envisageable.
Selon le chef de file des ministres européens des Finances, il ne faut pas exclure une décote de la dette grecque mais aussi savoir que cela ne suffirait pas à régler la crise.
La réunion des grands argentiers du G20, vendredi et samedi à Paris, avant le sommet européen du 23 octobre et enfin le rapport des bailleurs de fonds publics de la Grèce, attendu le lendemain de ce sommet, seront autant d'étapes cruciales.
L'Europe se sait observée par ses partenaires, des Etats-Unis, qui font pression pour qu'elle résolve ses problèmes, aux pays émergents. La Russie s'est dite prête lundi à aider la zone euro si elle définit "une stratégie claire et concrète de sortie de crise".
"Le président continuera à se coordonner de façon étroite avec ses homologues européens", avant le sommet du G20, a précisé lundi la Maison Blanche.