Nouveau coup dur pour la Bretagne et l'agroalimentaire français: le volailler finistérien Tilly-Sabco suspend à partir de janvier sa production de poulets pour l'export, une activité qui menace, selon lui, un millier d'emplois "à très court terme".
"En l'absence de soutien financier des pouvoirs publics, la filière ne peut supporter à elle seule, malgré les efforts de productivité réalisés et qu'elle entend poursuivre, la mise à zéro des restitutions, l'effondrement des prix à l'export et le niveau très élevé de l'euro", explique le groupe, deuxième exportateur de poulets français et européen.
Le 18 juillet, Bruxelles avait décidé de supprimer les aides à l'exportation pour les petits poulets congelés, dont la France restait quasiment la seule bénéficiaire, avec en premier lieu les groupes bretons Doux et Tilly-Sabco.
Ces aides ("restitutions") permettaient aux poulets européens de concurrencer les volailles brésiliennes sur la scène internationale.
L'arrêt de ces aides, conjugué à l'effondrement du real, la monnaie brésilienne, ont donc eu raison de Tilly-Sabco. Car, considérant que le poulet à l'export représente 90% de son chiffre d'affaires et occupe la quasi totalité de ses employés (300 sur 340 salariés), c'est la survie de l'entreprise qui est en jeu.
Jeudi, le PDG du groupe Daniel Sauvaget n'était pas joignable pour dire quelle suite il comptait donner à sa décision. Outre le poulet à l'export, Tilly-Sabco produit de la saucisse de poulet et des co-produits tirés de la volaille.
Et Doux ?
De plus, cette décision menace de plus à "très court terme plus d'un millier d'emplois bretons" en amont: dans les couvoirs, chez les fournisseurs d'aliments, les éleveurs, l'abattoir et les partenaires logistiques et de transport.
Tilly-Sabco cite notamment parmi les entreprises fragilisées Aliments Huttepain, Le Gouessant, Le Men, Michel Volailles Ouest, Nutréa, Sanders Bretagne ou UKL-Arrée.
Une mauvaise nouvelle de plus pour la Bretagne et le Finistère en particulier, où la société d'abattage et de découpe de porcs Gad a annoncé il y a quelques semaines la suppression de près de 900 emplois.
En août déjà, Tilly-Sabco avait réduit de 40% sa production. Et il y a quelques jours, Daniel Sauvaget estimait que seul un rapprochement avec son concurrent Doux était en mesure de sauver les deux entreprises et donc la filière avicole bretonne.
Mais Doux n'a jamais répondu. Contacté jeudi par l'AFP, le volailler n'a pas souhaité réagir au sort de son concurrent.
Le groupe, en redressement judiciaire depuis juin 2012, est concentré sur la validation de son plan de continuation. Le tribunal de commerce de Quimper devrait rendre sa décision fin novembre.
Le coup de grâce pour la filière ?
Reste qu'à partir de janvier, Doux sera la seule entreprise européenne à exporter des poulets. Une activité désormais fondamentale pour lui puisque lors de sa restructuration le volailler s'est recentré sur l'export et la transformation (Père Dodu), après s'être allégé à l'automne 2012 de son pôle frais, supprimant au passage un millier d'emplois.
En septembre, au salon agricole Space de Rennes, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault avait annoncé un certain nombre de mesures pour aider la filière à passer le cap de la fin des restitutions.
Des aides en trésorerie d'urgence, d'un montant maximum de 200.000 euros par entreprise, avaient notamment été débloquées pour une dizaine d'accouveurs et une dizaine d'organisations de producteurs. Reste à savoir maintenant si l'amont de la filière résistera à l'arrêt de Tilly-Sabco.
Le Collectif avicole français (CAF) avait tiré fin juillet la sonnette d'alarme assurant que l'arrêt de ces subventions condamnait "à très court terme" les 4.000 emplois directs de la filière.