Le ministre belge des Finances, Didier Reynders, a lézardé dimanche le front européen en faveur d'une candidature de Christine Lagarde à la direction du FMI en se disant intéressé par le poste, se posant en recours si des affaires judiciaires handicapent la Française.
Le Belge a indiqué qu'il était "bien entendu" intéressé par la direction générale du Fonds monétaire international, lors d'une interview sur la chaîne de télévision publique belge RTBF où il était interrogé sur la question.
"Ce sont des fonctions qui ne se refusent pas", a-t-il ajouté.
La campagne est désormais ouverte pour succéder au dernier directeur général du Fonds, Dominique Strauss-Kahn, forcé de démissionner après des accusations d'agression sexuelle.
Didier Reynders, un libéral francophone âgé de 52 ans, a fait valoir sa longue expérience de ministre des Finances, un poste qu'il occupe dans son pays depuis 1999, et le fait qu'il siégeait "depuis douze ans" au comité monétaire et financier international, chargé de conseiller la direction du FMI.
L'homme politique belge n'a toutefois pas contesté que dans la course à la candidature, la place de favorite était "très concrètement" occupée par son homologue française Christine Lagarde.
Il se pose plutôt comme un recours, capable de défendre la "légitime" candidature des Européens pour le poste, si la Française y renonçait.
Officiellement, Christine Lagarde n'est pas encore candidate. Mais plusieurs de ses homologues européens la soutiennent, notamment l'Allemand Wolfgang Schäuble ou le Britannique George Osborne. Et une source européenne la jugeait vendredi "quasiment intronisée" comme candidate de l'UE.
Christine Lagarde n'est toutefois pas à l'abri d'ennuis judiciaires. Un procureur français l'a récemment menacée d'une enquête dans un dossier lié à l'ex-homme d'affaires Bernard Tapie. Et la presse française a alimenté la polémique, notamment en affirmant qu'elle avait ignoré plusieurs fois dans ce dossier l'avis des conseillers de son ministère. Cela pourrait plomber sérieusement sa candidature.
Sa nationalité pourrait également l'handicaper: depuis 1946, le poste de directeur général du FMI a déjà été occupé durant 34 années au total par des Français, le dernier en date n'étant autre que Dominique Strauss-Kahn lui-même.
Didier Reynders a d'ailleurs égratigné dimanche la volonté des Français de conserver le poste. Tout en louant Christine Lagarde pour sa "très grande expérience" et sa "très bonne connaissance des Etats-Unis", le Belge a ainsi souligné qu'elle était favorite aussi "parce que les Français semblent vouloir assurer une sorte de droit de suite, de continuer la fonction".
Un droit de suite contesté aussi dans d'autres régions du monde.
La Communauté des Etats indépendants (ex-URSS moins les pays baltes et la Géorgie) a annoncé la candidature du chef de la Banque centrale du Kazakhstan, Grigori Martchenko. Le Mexique milite pour le gouverneur de sa banque centrale, Agustin Carstens. Et de possibles candidats chinois, indien ou sud-africain sont évoqués.
Les pays émergents estiment que leur tour est venu de diriger le FMI et de rompre ainsi avec la tradition qui veut qu'un Européen soit à sa tête tandis qu'un Américain préside la Banque mondiale.
Les Européens, soucieux de garder le poste, surtout dans le contexte actuel de crise de la dette en zone euro, sont d'ailleurs en train de réfléchir à une compensation à donner en échange aux émergents, a indiqué à l'AFP un ministre européen s'exprimant sous le couvert de l'anonymat.
Le Brésil s'est déjà dit prêt à appuyer un candidat européen s'il poursuivait les réformes de "démocratisation" du FMI.