Le gouvernement, inflexible sur la réforme des retraites à deux jours d'un vote définitif au Parlement, a chiffré à plusieurs centaines de millions d'euros le coût quotidien de ce conflit qui affectait toujours 25% des stations-service malgré la levée du blocus des dépôts.
La facture des grèves et blocages depuis deux semaines s'élève pour l'économie française à un montant compris "entre 200 et 400 millions d'euros par jour", s'est alarmée lundi la ministre de l'Economie Christine Lagarde.
"Ca commence à coûter cher, c'est une crise dont la France n'a pas les moyens de se payer le luxe", a renchéri son homologue du Budget François Baroin.
"Il faut envoyer la facture au président de la République, c'est quand même lui qui est responsable de ça", a répliqué du tac au tac le secrétaire général de FO Jean-Claude Mailly.
Les syndicats, qui ont appelé à deux autres journées d'action, jeudi, puis samedi 6 novembre, entendent maintenir la pression.
Selon l'Union française des industries pétrolières (Ufip) cependant, plus aucun dépôt de produits pétroliers, en dehors de ceux situés dans les raffineries, n'était bloqué en France.
"Demain sera la journée la meilleure depuis le début de la crise", a même assuré Jean-Louis Borloo, ministre de l'Energie en tablant sur un "objectif" de quatre stations sur cinq "en état de fonctionnement".
"Un objectif difficilement atteignable", a toutefois temporisé Jean-Louis Schilansky, président de l'Ufip, selon lequel 25% des stations souffraient toujours lundi d'une pénurie de carburant.
M. Borloo a d'ailleurs reconnu des difficultés persistantes d'approvisionnement en carburants dans plusieurs régions, dont l'Ile-de-France, mais a parlé de "réelles améliorations en fin d'après-midi".
Sept députés et autant de sénateurs, réunis lundi pour élaborer un texte commun, sont parvenus à un accord, qui permettra un vote définitif du projet mardi au Sénat et mercredi à l'Assemblée.
La réforme devrait être promulguée par le président Nicolas Sarkozy aux alentours du "15 novembre" selon son conseiller social Raymond Soubie, après un éventuel passage devant le Conseil constitutionnel.
Selon Mme Lagarde, la paralysie des 12 raffineries françaises a affecté en particulier l'industrie chimique, "qui a un besoin important de ravitaillement en produits pétroliers". Mais c'est aussi "très douloureux" pour les petites entreprises (PME/TPE).
D'autres secteurs ont été touchés, les travaux publics, le commerce ou le tourisme. La FNSEA a parlé de problèmes d'approvisionnement de plus en plus "aigus" pour les agriculteurs.
Le conflit entraîne aussi un "préjudice moral" pour la France, dont l'image est affectée à l'étranger par les incidents survenus en marge des manifestations, a estimé la ministre.
En ce qui concerne les raffineries, trois dont celles de Reichstett, Fos-sur-mer (Bouches-du-Rhône) et Gravenchon (Bas-Rhin) ont voté la reprise du travail et neuf la poursuite de la grève.
Le tribunal administratif de Melun a rejeté lundi le recours en référé introduit par les grévistes de la raffinerie de Grandpuits contre l'arrêté préfectoral de réquisition des salariés qui avait permis le déblocage de son dépôt de carburant, dénoncé immédiatement comme une "atteinte au droit de grève" par la CGT.
La pénurie n'est pas sans conséquence sur le porte-monnaie des Français, avec une hausse moyenne des prix de trois à huit centimes d'euros par litre de carburant, selon Bercy. Christine Lagarde a toutefois estimé que les "abus" restaient limités: 40 procès-verbaux dressés contre des pompistes sur 2.000 contrôles des prix effectués ces deux derniers jours.
Quant à la direction de la SNCF, elle a fait état d'une amélioration du trafic, avec par exemple plus de huit TGV sur dix en circulation.