par John O'Donnell et Balazs Koranyi
FRANCFORT (Reuters) - La Banque centrale européenne (BCE) a revu mercredi à la hausse sa prévision d'inflation 2015 en expliquant que son programme d'achats d'actifs de 60 milliards d'euros par mois commençait à porter ses fruits.
Le président de la BCE, Mario Draghi, a toutefois estimé lors de sa traditionnelle conférence de presse mensuelle que l'élan de la croissance dans la zone euro avait tendance à mollir.
La BCE, qui a maintenu comme prévu ses taux directeurs à des niveaux extrêmement bas, voire négatif pour le taux de la facilité de dépôt, s'attend désormais à une hausse de 0,3% des prix dans l'union monétaire cette année. Les précédentes prévisions de l'institut d'émission, présentées début mars, incluaient une inflation 2015 nulle.
"Les projections d'inflation ont été relevées pour 2015 et restent inchangées pour 2016 et 2017", a déclaré Mario Draghi. "Le Conseil des gouverneurs continuera de surveiller attentivement les risques sur les perspectives d'évolution des prix."
Cette nouvelle prévision tient compte du rebond des cours du pétrole, de la reprise économique et de l'impact du plan d'assouplissement quantitatif ("quantitative easing", QE) de plus de 1.000 milliards d'euros au total mis en oeuvre en mars.
L'institution de Francfort maintient parallèlement sa prévision de croissance pour la zone euro cette année à 1,5%, comme il y a trois mois. Il s'agirait de la meilleure performance de la région depuis 2011, lorsque son produit intérieur brut (PIB) avait progressé de 1,6%.
Pour 2016, la BCE prévoit une croissance de 1,9% et une inflation de 1,5% et pour 2017, elle table sur une progression de 2,0% du PIB et une hausse de 1,8% des prix.
"La reprise est sur les rails", a dit Mario Draghi. "Toutefois, nous avions espéré des chiffres meilleurs que nos projections initiales et à un moment les indicateurs allaient dans ce sens. Il y une certaine perte de dynamisme, je dirais modeste, principalement due aux développements dans les économies émergentes."
VOLATILITÉ
Les mesures de politique monétaire prises par la BCE, parmi lesquelles son vaste programme de rachat de dette du secteur public, "ont contribué à un large assouplissement des conditions monétaires", s'est félicité le président de la banque centrale. Leur pleine mise en oeuvre apportera "le soutien nécessaire à l'économie de la zone euro", a-t-il dit.
Le statu quo sur les taux directeurs était prévisible dans l'attente des résultats du programme d'achat d'actifs mis en oeuvre par l'institution.
La BCE a ramené en septembre dernier ses taux à de nouveaux plus bas historiques, le taux de refinancement, principal instrument conventionnel de sa politique monétaire, étant fixé à 0,05%.
Le taux de la facilité de dépôt reste quant à lui à -0,20%, ce qui signifie concrètement que les banques qui choisissent de déposer leurs liquidités à la banque centrale doivent rémunérer celle-ci. Quant au taux de la facilité de prêt marginale, les prêts au jour le jour accordés aux banques, il est maintenu à 0,30%.
La BCE reste attentive aux mouvements des marchés et notamment au phénomène de hausse des rendements obligataires observé récemment.
"Nous devrions nous habituer à des périodes de plus forte volatilité", a dit Mario Draghi. "Et quant aux conséquences que cela pourrait avoir sur l'orientation de notre politique monétaire, laissez-moi vous dire que le Conseil des gouverneurs a été unanime pour considérer que nous devrions passer outre ces développements et maintenir une trajectoire régulière de notre politique monétaire."
Dans le sillage de ces propos, le rendement du Bund allemand à 10 ans a accentué sa progression pour atteindre 0,88%.
Le président de la BCE a plaidé en outre en faveur d'un "accord fort" avec la Grèce permettant à celle-ci de rester au sein de la zone euro et de renforcer son économie.
"Le Conseil des gouverneurs de la BCE veut que la Grèce reste dans l'euro", a-t-il dit. "Mais il faut qu'il y ait un accord fort, et un accord fort est un accord qui produit de la croissance, qui prend en compte la justice sociale mais aussi qui est viable du point de vue budgétaire et qui s'attaque aux facteurs persistants d'instabilité dans le secteur financier", a-t-il ajouté.
(Marc Angrand et Patrick Vignal pour le service français, édité par Véronique Tison)