par Lucia Mutikani
WASHINGTON (Reuters) - La Réserve fédérale devrait relever ses taux d'intérêt au deuxième trimestre de l'an prochain même si la chute des prix de l'énergie réduit nettement les tensions inflationnistes, montre mercredi une enquête de Reuters.
Après l'annonce de créations d'emploi plus nombreuses qu'attendu en novembre, qui s'ajoutent à d'autres indicateurs suggérant une croissance solide l'an prochain, certains économistes s'attendent à ce que la Fed précise ses intentions à l'issue de sa réunion de politique monétaire dans une semaine.
Elle pourrait notamment modifier les termes employés pour évoquer les perspectives d'évolution des taux et/ou revoir à la hausse ses prévisions économiques.
"La baisse des prix du pétrole va faire reculer le taux d'inflation, au moins temporairement. Toutefois, nous considérons les indicateurs de croissance et ceux du marché du travail comme des facteurs décisifs pour la normalisation de la politique de taux d'intérêt", explique Terry Sheehan, analyste de Stone & McCarthy.
La Fed maintient des taux quasi-nuls depuis décembre 2008 mais la phase de reprise, certes peu spectaculaire mais régulière, que traverse actuellement l'économie américaine a ramené ces derniers mois le taux de chômage à un niveau (5,8% en novembre) proche de celui que la banque centrale estime correspondre à une situation de plein emploi.
Trente-sept des 77 économistes qui ont participé à l'enquête ont dit s'attendre à ce que la première hausse de taux soit annoncée au cours du deuxième trimestre de l'an prochain, 27 d'entre eux évoquant le mois de juin.
Vingt-deux autres s'attendent à ce que la Fed attende le troisième trimestre et sept tablent sur un changement au quatrième trimestre seulement.
LA REMONTÉE DES TAUX S'ANNONCE LENTE
L'enquête montre aussi que l'inflation américaine devrait se situer en moyenne à 1,4% l'an prochain, un niveau inférieur de 0,4 point au résultat de l'enquête précédente.
Cet écart s'explique évidemment par la chute récente des cours du baril, actuellement au plus bas depuis cinq ans.
Trente-huit des 48 économistes qui ont participé à l'enquête de novembre et à celle de décembre ont revu à la baisse leur prévision d'inflation 2015.
L'inflation sous-jacente, elle, devrait toutefois rester plus ferme: le taux d'inflation de base, qui exclut l'énergie et l'alimentation, devrait se situer à 1,9% en moyenne en 2015, un chiffre inchangé par rapport au mois dernier.
La Fed s'est fixé un objectif d'inflation de 2% mais se réfère à un indice différent de l'indice des prix à la consommation CPI.
"Le chômage l'emporte sur l'inflation pour la Fed. Si l'inflation n'atteint pas l'objectif de 2% parce que les prix de l'énergie chutent, ce ne sera pas un problème pour la Fed", estime Chris Rupkey, chef économiste de MUFG Union Bank.
L'enquête montre qu'une fois enclenchée, la remontée des taux d'intérêt américains devrait être lente et mesurée: le taux des fonds fédéraux (les "fed funds") devrait passer de 0,25% au deuxième trimestre 2015 à 1,125% seulement au premier trimestre 2016.
La croissance du produit intérieur brut (PIB) américain, elle, est attendue à 2,4% en rythme annualisé au quatrième trimestre et 3,0% au premier trimestre 2015.
(Marc Angrand pour le service français, édité par Juliette Rouillon)