La Grèce menace depuis mars d'un défaut de paiement si ses créanciers ne débloquent pas une nouvelle tranche de prêts, mais elle n'a manqué encore aucune échéance de remboursement. Pour juin, la situation se corse, poussant à un accord très rapide avec les créanciers.
"Il faut un accord immédiatement (...) pour résoudre ces problèmes de liquidité cruciaux", a estimé lundi le porte-parole du gouvernement Gabriel Sakellaridis lors d'un point de presse.
La Grèce attend depuis neuf mois -- soit bien avant l'arrivée du gouvernement Syriza en janvier -- une tranche de 7,2 milliards promis par ses créanciers internationaux, Fonds monétaire international (FMI), Union européenne (UE) et Banque centrale européenne (BCE), dans le cadre des 240 milliards d'aide promis au pays depuis 2010.
Les discussions stagnent car Athènes juge socialement difficiles les réformes du marché du travail et des retraites exigées par les créanciers.
Or l'issue de cette confrontation semble proche, car il semble bien ne plus y avoir d'argent dans les caisses de l'Etat grec.
Le Premier ministre Alexis Tsipras avait averti par lettre dès le 15 mars la chancelière allemande Angela Merkel de l'urgence pour Athènes d'obtenir ces fonds, en raison des échéances de remboursement à venir d'ici l'été.
Mars et avril s'étaient pourtant passés sans heurt, au point que l'idée d'un bluff d'Athènes était évoqué.
L'inquiétude est repartie ce week-end, avec la révélation d'une nouvelle lettre de M. Tsipras avertissant ses créanciers début mai que le pays ne pourrait pas s'acquitter le 12 mai d'une échéance de 750 millions d'euros au FMI.
Finalement, le gros de la somme avait pu être trouvé dans un fonds d'urgence, et le paiement a été effectué.
- Un mois "très difficile" -
Mais en juin, c'est 1,5 milliard d'euros que doit la Grèce au FMI, en quatre versements étalées du 5 au 19 juin, et au total, 11 milliards d'euros à ses créanciers entre juin et août, principalement à la BCE.
A Athènes, un connaisseur de ces questions, souhaitant garder l'anonymat, qui haussait les épaules en avril devant l'inquiétude entourant les paiements du mois, reconnaît cette fois que juin sera "très difficile", à partir du 12.
Car du 12 au 30, le gouvernement devra aussi renouveler des bons du Trésor pour 5,2 milliards d'euros, et payer retraites, fonctionnaires et fonds de sécurité sociale (environ 2,2 milliards d'euros).
Les fournisseurs de l'Etat pourraient être les sacrifiés dans cette situation, pour gagner un peu de temps.
Personne ne sait ce qui arriverait en cas de défaut de paiement aux créanciers, ce qui serait une première dans un pays de la zone euro.
Certains font valoir qu'un petit accident de paiement sur une échéance aurait le mérite de hâter un accord pour colmater rapidement cette brèche dangereuse.
Les analystes travaillent aussi sur l'hypothèse d'une émission par Athènes d'IOUs (phonétiquement en anglais "I owe you", "je te dois") des reconnaissances de dette pour payer les dépenses internes, afin de conserver les euros dus aux créanciers, en attendant des jours meilleurs.
Les négociations avancent, mais à tout petits pas : "les Grecs sont plus prompts à dire ce qu'ils ne veulent pas qu'à proposer des choses", s'est plaint lundi le commissaire européen à l'Economie Pierre Moscovici.
Jesus Castillo, économiste chez Natixis, croit fermement pourtant à un accord salvateur : "On est toujours dans le bras-de-fer, mais ça n'aurait pas de sens d'avoir pris tout ce temps et engagé autant d'argent sur la Grèce pour à la fin tout perdre".
Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker aurait un plan pour en sortir, annonçait lundi après-midi le journal grec To Vima sur son site internet.
Celui-ci consisterait à verser à la Grèce la moitié des 7,2 milliards d'euros, correspondant à la part de l'UE et de la BCE, en laissant de côté les sujets sociaux contentieux, et en échange d'une adoption avant l'été par le Parlement grec d'un train de mesures fiscales convaincant.
Une porte-parole de la Commission a indiqué "ne pas être au courant", et que la Commission continuait à travailler sur l'hypothèse "d'un accord complet", impliquant notamment le FMI.