Le MRJ, 1er avion de ligne à réaction japonais, a effectué avec succès mercredi matin son premier vol d'essai, a constaté sur place un journaliste de l'AFP, une étape cruciale qui avait été reportée cinq fois.
"C'était fantastique", a assuré le pilote Yoshiyuki Yasumura, un vétéran, lors d'une conférence de presse quelques heures après la fin du vol.
"C'est un succès, proche de la grande réussite, j'éprouve une joie sans limite", s'est enthousiasmé Hiromichi Morimoto, patron de Mitsubishi Aircraft, filiale dédiée du conglomérat Mitsubishi Heavy Industries (MHI).
"Il va falloir désormais accumuler des milliers d'heures de vol de test", a-t-il ajouté.
Le Mitsubishi Regional Jet (MRJ), aéronef de près de 100 places, s'est élancé de l'aéroport de Nagoya sous un ciel bleu et quasiment sans vent.
Il s'agit du premier avion civil japonais conçu depuis un demi-siècle. Le précédent, appelé YS11, était un modèle à hélices. Les deux ont bénéficié de l'aide financière des pouvoirs publics japonais.
"Nous sommes ravis de la réussite du premier vol d'essai", s'est félicité le porte-parole du gouvernement, Yoshihide Suga, souhaitant "que se poursuive la collaboration public-privé pour le succès du programme MRJ".
Le vol s'est déroulé sans problème, sous les exclamations réjouies des commentateurs des télévisions japonaises.
L'appareil, d'environ 35 mètres de long sur 29 mètres d'envergure, a atterri en douceur après un trajet de près d'une heure et demie dont le tracé n'a pas été rendu public.
Il était escorté par deux avions chasseurs des forces d'autodéfense.
Une centaine de journalistes et autant d'invités, dont des représentants du ministère de l'Industrie, étaient sur place pour assister à ce moment important dans l'histoire de l'aviation civile japonaise.
"C'était un avion de papier qui est devenu une réalité et cela devrait avoir un impact auprès des potentiels clients", a espéré M. Morimoto.
Ce vol d'essai devait avoir lieu le mois dernier après quatre changements antérieurs de calendrier de développement, mais un souci de pédale avait conduit MHI et sa filiale dédiée Mitsubishi Aircraft à différer une nouvelle fois ce test.
Développé depuis près d'une décennie avec plusieurs changements de conception, le MRJ existera d'abord en deux versions, de quelque 70 et 90 sièges, avant l'extension de la gamme à une troisième variante d'une centaine de places.
- 400 commandes, 1ère livraison en 2017 -
MHI a reçu à ce jour plus de 400 commandes (options comprises) pour ce programme dont la phase industrielle a débuté en 2008 après des années d'hésitation.
La première livraison, à la compagnie japonaise ANA, est prévue au printemps 2017.
"Il va nous falloir recruter des personnels expérimentés, notamment du côté des Etats-Unis", a souligné M. Morimoto.
Le développement et les tests divers se poursuivent parallèlement au Japon et aux Etats-Unis dans le but d'accélérer l'obtention des certifications requises.
Pas moins de cinq usines au Japon participeront à la production en série du MRJ équipé d'un nouveau type de moteur dit "Turbofan" du groupe américain Pratt & Whitney (P&W)
L'assemblage final aura lieu à Komaki (centre du Japon), tandis que les ailes seront fabriquées à Kobe (sud-ouest) et réunies avec le fuselage à Tobishima (centre).
Un des complexes industriels utilisés, à Matsutaka, a pour ambition de combiner la production de pièces métalliques pour les avions à celles des automobiles afin de mutualiser des moyens industriels et logistiques nombreux dans la région de Nagoya, aussi bien fief des activités aéronautiques de MHI que des usines de voitures Toyota (T:7203).
Mitsubishi Heavy prévoit de construire dix appareils par mois avec, pour chacun, un million de pièces.
MHI vante depuis l'origine le confort de la cabine (plus spacieuse que pour les autres avions régionaux) et les caractéristiques écologiques de son nouvel aéronef, principalement en termes de réduction des nuisances sonores et des émissions polluantes, le tout par comparaison aux "deux grands du marché", une référence implicite au brésilien Embraer et au canadien Bombardier.
Le groupe nippon, également actif dans les secteurs de l'énergie nucléaire, des éoliennes et des machines industrielles, ambitionne de compter parmi les principaux fournisseurs mondiaux de cette gamme d'appareils de taille inférieure à ceux proposés par Airbus (PA:AIR) et Boeing (N:BA) dont MHI est depuis longtemps un grand fournisseur de pièces.