par Elizabeth Pineau et Denis Pinchuk
MOSCOU (Reuters) - François Hollande et Vladimir Poutine ont affirmé jeudi soir à Moscou leur souhait commun de coopérer contre le terrorisme, le président français réitérant sa volonté de bâtir une "large coalition" contre l'Etat islamique.
Dès le début de leur entretien au Kremlin, les deux dirigeants ont rappelé l'urgence d'agir après les attentats attribués à Daech dont leurs deux pays ont été victimes.
"Le terrorisme est notre ennemi. Il a un nom : Daech, l'Etat islamique. Il a un territoire, une armée, des ressources", a dit le président français, l'air grave.
"Nous devons faire cette large coalition pour frapper le terrorisme et nous coordonner pour atteindre l'Etat islamique et chercher une solution politique pour la Syrie", a-t-il ajouté en tutoyant son homologue russe.
Après la résolution contre le terrorisme adoptée à l'unanimité au conseil de sécurité de l'Onu, "nous devons être à l'initiative", a insisté le président français, appelant chacun à prendre ses "responsabilités."
Opinant du chef, Vladimir Poutine a jugé nécessaire d'"unir les efforts" contre le terrorisme.
"Nous sommes prêts à coopérer avec la France", a-t-il dit, parlant d'"ennemi commun" sans désigner expressément l'Etat islamique.
Les deux dirigeants, accompagnés chacun par leurs ministres des Affaires étrangères et de la Défense, devaient ensuite avoir un dîner de travail.
Parmi les questions sur la table figurent les moyens de renforcer la coordination militaire contre Daech dans un contexte encore tendu par le crash d'un avion de chasse russe abattu mardi par la Turquie, qui l'accuse d'avoir violé son espace aérien.
L'idée d'une "grande coalition unique" contre l'Etat islamique défendue par François Hollande semble difficile, notamment en raison des réticences américaines. Paris parle de trouver, au moins, des "modalités de coordination" permettant d'être plus efficace sur le terrain.
DAECH, "ENNEMI COMMUN"
Daech est l'ennemi désigné de la Russie et de la France depuis les attentats commis le 31 octobre contre un charter russe au-dessus du Sinaï, puis le 13 novembre à Paris.
Le drame français a provoqué une intense émotion en Russie, pays régulièrement confronté au terrorisme. Dès la nuit des attentats, les Moscovites sont venus par milliers déposer fleurs et bougies devant l'ambassade de France.
Désormais disposée à faire des Russes ses alliés contre Daech, la France espère convaincre Vladimir Poutine de concentrer ses frappes sur l'EI plutôt que sur les forces d'opposition modérées à Bachar al Assad, ce que Moscou dément.
Paris insiste aussi sur l'urgence d'empêcher le président syrien de bombarder la population civile et d'engager un processus conduisant au départ du pouvoir de Bachar al Assad, soutenu par Moscou et Téhéran.
Sur ce dernier point, François Hollande s'est montré précis jeudi matin après une rencontre avec le président du Conseil italien Matteo Renzi à l'Elysée.
"Le processus de Vienne doit être mené jusqu'à son terme c'est-à-dire avec une transition politique et des élections qui forcément aboutiront au départ de Bachar al Assad", a-t-il dit.
Le dossier ukrainien, pour lequel François Hollande et la chancelière Angela Merkel ont joué les facilitateurs, devrait être abordé jeudi soir. Moscou espère la levée d'une partie des sanctions occidentales prononcées après l'annexion de la Crimée par Moscou.
Vladimir Poutine fera l'aller-retour à Paris lundi prochain pour l'ouverture de la conférence mondiale sur le climat, qui réunira quelque 140 chefs d'Etat et de gouvernement dans la capitale française.
(Avec Jean-Baptiste Vey à Paris, édité par Yves Clarisse)